Ukraine : les investisseurs-vautours planifient le dépeçage du pays

Image James Cleverly, ministre britannique des Affaires étrangères et Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne,

 

Par Joël Perichaud, Secrétaire national du Pardem aux relations internationales

21 et 22 juin 2023. Baptisée « Conférence sur le redressement de l’Ukraine », la réunion qui s’est tenue à Londres a été l’occasion pour les gouvernements des pays membres de l’OTAN, leurs banques et leurs entreprises, de planifier leurs opérations de pillage néolibéral en Ukraine.
Les vautours tournoient et s’acharnent sur les ressources et l’économie ukrainienne dévastées par la guerre entre l’OTAN et la Russie. Ils préparent la captation des ressources énergétiques et la super-exploitation des classes dominées. L’Union européenne est dans les starting-blocks. Des milliards d’investissements juteux sont programmés.  En notre nom ?!

 

L’événement, passé inaperçu, avait un air surréaliste. Il puait la mort. Les Occidentaux y ont travaillé et tiré des plans sur la comète sur le « potentiel économique important » de l’Ukraine alors même que des millions d’Ukrainiens ont dû fuir leur maison, des centaines de milliers ont été tués et que les pertes s’élèvent à 700 milliards de dollars (fermetures d’entreprises, destruction des infrastructures et des terres agricoles) à cause d’une guerre qu’ils ont provoquée et qui pourrait durer des années.

La guerre, c’est bon pour les affaires !

Une partie de la conférence fut consacrée à demander que la Russie paie les réparations de la guerre de l’OTAN via une plate-forme dédiée. Toujours exaltée, Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne (CE), a annoncé que la reconstruction de l’Ukraine serait financée « en fin de compte par les recettes qui proviennent des actifs russes immobilisés », car l’Union européenne (UE) veut utiliser à cette fin les 200 milliards d’euros de réserves russes “gelées”, en fait raptées sur le continent européen. Le Royaume-Uni, les États-Unis et le Canada discutent du même procédé.
Le “grand show” de Londres a mis une nouvelle fois en évidence la relation incestueuse entre Zelensky et son gouvernement let les puissances de l’OTAN.
Se présentant comme le sauveur de l’Ukraine, de sa démocratie et de sa souveraineté, l’alliance impérialiste USA-UE ne considère en fait le pays que comme un État vassal. Déjà saignée à blanc militairement et démographiquement par l’OTAN, bras armé des USA, et par sa marionnette Zelensky, l’Ukraine va subir un véritable

Le vol des vautours

Lors de l’ouverture de la conférence, Rishi Sunak, le Premier ministre britannique, milliardaire et adepte du thatchérisme, a déclaré: « Avant cette terrible guerre, l’économie de l’Ukraine devenait une énorme opportunité d’investissement », ajoutant que « la vérité est que cette opportunité existe toujours aujourd’hui… En fait, la guerre n’a fait que prouver tout ce que l’Ukraine possède et peut offrir ». Selon lui et ses amis, l’Ukraine est « prête pour les investissements » et « le gouvernement du président Zelensky est déterminé à mener des réformes pour devenir plus ouvert, plus transparent et prêt pour les investissements ». Complice, Zelensky s’est adressé à la conférence par liaison vidéo.
Fidèle à sa tradition colonialiste, la Grande-Bretagne a publié une déclaration expliquant que « la communauté internationale qui participe à la conférence souhaite libérer le potentiel du secteur privé pour contribuer au redressement de l’Ukraine ».
Pas en reste, Anna Bjerde, directrice des Opérations de la Banque mondiale (BM), a déclaré que « l’Ukraine dispose d’un potentiel considérable pour transformer une grande partie de ses actifs en opportunités économiques ».
Quant au Premier ministre ukrainien, Denys Shmyhal, représentant l’oligarchie de Kiev, il compte tirer lui-même grand profit du pillage néolibéral qu’il organise, Il déclare dans Politico : « Actuellement, l’Ukraine possède des gisements de 21 des 30 éléments rares que l’UE considère comme des matières premières essentielles, les deuxièmes plus grandes réserves de gaz d’Europe, 41,3 millions d’hectares de terres agricoles de qualité et l’un des écosystèmes numériques les mieux développés. Elle dispose également de l’élément le plus important, à savoir des personnes qualifiées, énergiques et travailleuses…Tous ces facteurs, auxquels s’ajoute un programme de relance de plusieurs centaines de milliards de dollars, ouvrent une fenêtre d’opportunité pour les investisseurs étrangers ».
Manière détournée de déclarer la chasse ouverte aux ressources naturelles et aux infrastructures de l’Ukraine ainsi qu’à sa population active.
De quoi faire saliver le vice-président de la Commission européenne, Maroš Šefčovič, qui a déclaré à Politico que :  « l’Ukraine pourrait remplacer complètement les approvisionnements de la Russie en matières premières critiques pour l’Europe… L’Ukraine possède les plus grandes installations souterraines de stockage de gaz en Europe, 33 milliards de mètres cubes, juste à la frontière de la Slovaquie. Le potentiel est énorme. Il pourrait s’agir d’un atout stratégique très important pour la sécurité énergétique de l’Union européenne ».
La course mondiale aux sources stratégiques de matières premières a commencé depuis longtemps au cours de laquelle les États-Unis et les principales puissances de l’UE tentent de se s’approprier les ressources, minérales, énergétiques et autres, des États “plus faibles”. On comprend donc la raison des actions permanentes et systématiques d’affaiblissement par tous les moyens (y compris la guerre) menées par les États-Unis et ses affidés anglo-saxons, européens ou d’autres régions du monde.

Odeur du profit, odeur du sang

Ainsi l’UE prévoit d’investir jusqu’à 72 milliards d’euros en Ukraine entre 2024 et 2027, les États-Unis ont déjà envoyé 26,4 milliards de dollars de soutiens financiers, la Grande-Bretagne a annoncé 3 milliards de dollars de garanties de prêts de la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI) fournit 15 milliards de dollars sur quatre ans.
Mais si certains de ces fonds sont des subventions, la plupart sont des prêts qui alourdissent à dessein la dette de l’Ukraine (dette extérieure de plus de 70 milliards de dollars selon le ministère des Finances du pays). En fait, l’Ukraine paiera cette année plus de 3 milliards de dollars d’intérêts et 10 milliards de plus en 2024…
Si les subventions sont mises en avant, c’est pour masquer que les fonds sont surtout destinés à ouvrir l’Ukraine aux entreprises privées américaines et européennes. Lors de la conférence sur le redressement, Sunak a annoncé la création de l’Ukraine Business Compact « pour que le secteur privé s’engage à soutenir le redressement et la reconstruction de l’Ukraine » ajoutant que « plus de 400 entreprises de 38 pays, avec une capitalisation boursière combinée de 4 900 milliards de dollars, ont déjà signé ».
BlackRock, qui détient une part importante de la dette ukrainienne, et la banque JP Morgan travaillent avec le gouvernement ukrainien pour mettre en place une « banque de reconstruction » qui « peut attirer des centaines de milliards de dollars d’investissements privés ».
Pour encourager ces investisseurs-vautours, Zelensky a poursuivi une vague de privatisations, de réduction du droit du travail et de la protection sociale, qu’il avait commencées avant la guerre OTAN-Russie, depuis le coup d’État de Maïdan en 2014, visant à intégrer l’Ukraine à l’UE.
D’ailleurs, Alexander Rodnyansky, conseiller économique de Zelenskyy, a expliqué dans le pur langage néolibéral, que « l’Ukraine doit réorganiser son droit du travail et redoubler d’efforts pour privatiser des milliers d’entreprises afin de réparer son économie »… En particulier «la facilité d’embauche, la facilité de licenciement, les indemnités de licenciement, la flexibilité des horaires et des contrats et les contrats à durée déterminée », ainsi que la suppression du salaire minimum: « Nous devons nous assurer qu’il n’est pas trop élevé. Car notre économie est en train de s’effondrer. Nous devons nous assurer qu’il ne fait pas augmenter le chômage ».
Passant de la parole aux actes, des lois ont déjà été adoptées pour réduire les droits des employés et introduire des contrats à zéro heure. La privatisation des 15 plus grandes entreprises publiques du pays, en autorisant la vente de leurs actions jusqu’à concurrence de 49 %, est en marche. Au premier trimestre 2023, le gouvernement Zelensky a réalisé des bénéfices records grâce à la vente de petits actifs de l’État. Mais ce n’est pas suffisant pour la mafia ukrainienne au pouvoir : des lois pour faciliter la vente complète des grandes entreprises, notamment les grandes usines chimiques et industrielles et les sociétés d’énergie, sont en cours d’élaboration.

Rêve néolibéral, cauchemar des peuples

Au nom de la libre concurrence, du libre marché, de la productivité et du profit, l’UE, la Grande-Bretagne, la Banque mondiale et consort procèdent, avec la complicité active des oligarques ukrainien, au dépeçage de l’Ukraine au bénéfice des multinationales, en particulier étasuniennes et allemandes. Et pour y parvenir le plus rapidement possible, il est nécessaire d’endetter le pays, de tout privatiser, d’éliminer toute résistance du peuple ukrainien, de le domestiquer. idéologiquement et de le faire combattre contre un ennemi héréditaire imaginaire et désigné. Voilà pourquoi l’impérialisme américain, les néolibéraux de l’UE, les banquiers internationaux et leur bras armé, l’OTAN, sont prêts a faire durer la guerre jusqu’au dernier Ukrainien si c’est nécessaire. Une colonisation pratiquée au nom du bien et de la démocratie !