Venezuela : Yankees, bas les pattes !

 

Par Joël Perichaud, secrétaire national du Parti de la démondialisation chargé des relations internationales

 

Le 3 mars 2018

Pendant ces presque 20 années de révolution bolivarienne, il y a eu au Venezuela cinq ambassadeurs américains et d'innombrables « chargés d'affaires » irrespectueux des décisions populaires et pratiquant une ingérence manifeste dans les affaires intérieures du Venezuela. Portraits :

- John Maisto (1997-2000), vétéran des opérations secrètes et des opérations de renseignements a assisté la CIA, en Bolivie, lors de la capture et de la mort de Che Guevara. Il a travaillé dans le renseignement en Colombie et au Costa Rica, a aidé à renverser le président Marcos aux Philippines. Il gérait la section politique de l'ambassade américaine qui a préparé l'invasion de 1989 au Panama. Il a participé activement à la chute du gouvernement sandiniste après la « victoire » de Violeta Chamorro au Nicaragua, (début des années 90).

Au Venezuela, l'ambassade étasunienne a imposé Henrique Salas Römer comme candidat unique de la droite (en évinçant des candidats qui avaient fait campagne pendant plus d'un an) et financé sa campagne...avant la victoire de Hugo Chávez aux élections présidentielles de 1998.

- Donna Hrinak (2000-2002), ambassadrice en République Dominicaine et en Bolivie, traitait les présidents de ces pays comme si elle était leur patron.

Elle rencontra, en audience privée, Hugo Chávez après qu’il eût condamné le bombardement de l'Afghanistan par les Etats-Unis (nombreux morts civils). Lors de cette audience, elle tenta d'exiger de lui qu'il soit moins critique envers les Etats-Unis. On sait que Chávez l'a interrompue en disant : « Vous parlez comme le Chef de l'Etat. En ce qui concerne votre position, vous ne vous comportez pas correctement, s'il vous plaît, retirez-vous maintenant... ».

- Charles Shapiro (2002-2004) était apprécié pour son travail d'attaché militaire au Chili tandis qu'il préparait le renversement de Salvador Allende. Il s'était distingué pendant la « guerre sale » contre les guérillas du Salvador et du Nicaragua dans les années 80. Washington lui demanda de traiter le « problème Chávez ». 

Il est arrivé au Venezuela un mois avant le coup d'Etat d'avril 2002, qu'il a évidemment contribué à financer et auquel il a participé directement comme le prouvent les enregistrements d’émissions de radio faites par les putschistes.

Sa présence avec les attachés militaires James Roger et Ronald Mac Cameron aux côtés des généraux putschistes à Fuerte Tiuna (siège du Ministère de la Défense) les 11 et 12 avril est attestée.

Le 13 avril, il s'est rendu à Miraflores (Palais présidentiel) avec l'ambassadeur d'Espagne à Caracas, Manuel Viturro de la Torre, pour rencontrer le président « de fait » Pedro Carmona Estanga. Celui-ci venait d’abroger la Constitution de 1999 et de dissoudre les pouvoirs publics constitués. Une semaine plus tard, C. Shapiro demanda à rencontrer Hugo Chávez...

- William Brownfields (2004-2007) a commencé sa carrière diplomatique en 1979 comme vice-consul à Maracaibo, seconde ville du Venezuela, siège d'importantes installations pétrolières. Traditionnellement, tous les postes de ce consulat sont occupés par des agents de la CIA ou par des fonctionnaires du renseignement.

Avant d'être nommé ambassadeur au Venezuela, W. Brownfield a participé à la préparation du fameux « Plan Colombie1» et a supervisé les politiques du Département d'Etat concernant Cuba. Au Venezuela, il s'est consacré à promouvoir la sécession de l'état de Zulia et a installé une succursale de l'ambassade (pas un consulat) à Maracaibo.

En novembre 2006, il envoie un rapport dans lequel il précise comment des dizaines d'organisations non gouvernementales (ONG) du Venezuela reçoivent un financement du gouvernement nord-américain par l'intermédiaire de l'USAID et du Bureau des Initiatives de Transition (OTI). Dans ce rapport, « l'ambassadeur » proposait la stratégie suivante : renforcer les « institutions démocratiques, » s'infiltrer dans la base politique de Chávez, diviser le Chavisme, protéger les affaires vitales pour les Etats-Unis et isoler Chávez au niveau international. Ce rapport fut divulgué en avril 2013 par Wikileaks...

- Patrick Duddy (2007-2010) a poursuivi la politique de son prédécesseur. Sous sa gestion, le contrespionnage vénézuélien reçut des rapports affirmant que l'ambassade nord-américaine préparait une « surprise » pour les élections régionales de 2008... Elles furent largement gagnées par le Chavisme.

En août 2008, en solidarité avec le gouvernement bolivien, qui avait expulsé l'ambassadeur Philip Goldberg et fermé l'ambassade américaine, Hugo Chávez donna 72 heures à P. Duddy pour quitter le pays.

A son retour à Caracas 9 mois plus tard, P. Duddy à distribué de juteux financements aux médias d'opposition. Wikileaks a relevé son mécontentement et sa frustration compte tenu du très bas rendement de ces financements...

Après le départ de P. Duddy, les ambassadeurs étatsuniens ont été remplacés par des chargés d'affaires. Rien n’a changé : 

- Todd Robertson, l'actuel chargé d'affaires, arrivé au Venezuela le 18 décembre 2017, a écrit, sur son compte Twitter, qu'il était venu au Venezuela avec pour mission de rétablir la démocratie, comprendre qu'il a été envoyé par le gouvernement de Donald Trump pour tenter de renverser le gouvernement constitutionnel du Président Nicolás Maduro. Ce même fonctionnaire, lors d'une réunion avec le chancelier (ministre vénézuélien des relations extérieures) Jorge Arreaza, se faisant l'écho d'un communiqué du Département d'Etat en date du 14 décembre 2017, a exercé une pression pour la libération immédiate de Joshua Holt, terroriste reconnu, arrêté en possession d'un véritable arsenal de guerre dont le procès avait débuté 2 jours auparavant. Notons que J. Holt a été signalé par le député à la Constituante, Diosdado Cabello, comme directeur d'un réseau d'espionnage yankee s'étendant sur toute l'Amérique Latine.

Lors d’une interview récente publiée sur www.runrun.es (média digital d’opposition violente) le « diplomate » a proféré les menaces habituelles, vanté l'efficacité des sanctions imposées au Venezuela, et en annoncant d'autres, a incité la FANB (Fuerza Armada Nacional Bolivariana - Forces armées vénézuéliennes) à faire un coup d'Etat et à affirmé que lui-même et son personnel sortiroaint dans la rue pour entrer en contact avec les membres de la contre-révolution. Ingérence, quand tu nous tiens...

Dans les circonstances actuelles, déclarer cet individu « persona non grata » ne servirait à rien...Il serait rapidement remplacé. Il convient vraisemblablement d'ordonner le départ de tout le personnel de l'ambassade nord-américaine et d'avoir les relations minimales avec l'Empire par l'intermédiaire d'un pays ami désigné d'un commun accord. C’est ce qui se fait habituellement dans cette situation.

Une mesure de cette nature, qui peut sembler drastique, correspond pourtant aux circonstances : Les Etats-Unis, sans avoir déclaré officiellement la guerre au Venezuela, soumettent ce pays, et ce bien avant la présidence de Maduro, à une guerre non conventionnelle dans toutes ses variantes : diplomatique, médiatique, économique, financière, psychologique et cybernétique.

Cette mesure contribuerait à empêcher ou du moins à rendre plus difficile le soutien logistique et financier que les Etats-Unis apportent à « l’opposition » putschiste, via son ambassade et l'immunité diplomatique.

Note :

1 - Plan signé par les gouvernements américain et colombien en 2000 avec pour objectif proclamé, la réduction de la production de drogue en Colombie, Assimilé à un « Plan Marshall », il consistait en une aide financière conséquente à l'armée colombienne et en de nouvelles stratégies de lutte contre le narcotrafic. En réalité le Plan Colombie justifiait l'expansion de l'influence américaine en Colombie. De plus, le plan se concentrait exclusivement, sur la lutte contre les FARC et ne cherchait pas à contrer le narcotrafic. En quinze ans d'application, les États-Unis ont investi dix milliards de dollars en Colombie, ce qui constitue le plus important budget d'aide militaire américaine après celui octroyé a Israël.