A propos de la "laïcité positive"

Le vendredi 12 septembre 2008, le pape Benoît XVI s’est rendu en France pour une visite de quatre jours pendant lesquels il s’est exprimé successivement devant des personnalités (membres du gouvernement, maire de Paris, dignitaires religieux) à l’Élysée, puis devant des représentants du monde culturel au collège des Bernardins, devant deux cents académiciens à l’Institut de France et enfin devant 170 évêques et cardinaux à Lourdes. Sans compter les messes qu’il a célébrées devant des milliers personnes.

Cette visite a été l’occasion pour le Pardem de revenir sur la prise en compte et l’analyse d’une « ligne de front » particulière qui intéresse le champ politique à plusieurs titres. Il s’agit de la confrontation entre les catholiques non-laïques et les républicains (religieux ou non).

Certes, sur cette question le Pardem a clairement indiqué ses positions républicaines et laïques. Mais au-delà de grands principes philosophiques, nous sommes persuadés que se mènent sur ce terrain de nouveaux combats idéologiques et stratégiques dont l’issue déterminera durablement le fonctionnement de nos institutions, de nos services publics et même l’établissement de nos lois futures. Le Pardem, en tant que parti politique, tient donc à préciser son orientation au regard de ce rapport de forces qui semble, à la lumière de l’actualité, évoluer de façon rapide et inédite.

 

Offensives contre la loi française de 1905

Pendant sa visite en France, le pape s’est bien gardé de rallumer le conflit sur la question laïque. Il n’a pas fait l’erreur de sous-estimer le poids politique et historique de l’opinion populaire française qui est attachée à la loi de 1905. Mais nous n’oublions pas ses précédents discours et prises de position, notamment en ce qui concerne la « laïcité positive ».

 

De quoi s’agit-il ?

Contrairement à ce qui est écrit parfois, cette doctrine a été élaborée au Vatican. Son but est d’affaiblir le concept français de la laïcité appuyé sur la loi de 1905. En effet celle-ci représente par son ossature universelle, un modèle, une aspiration pour de nombreux peuples en proie à des théocraties obscurantistes et par conséquent une menace pour les cléricaux de tout bord.

Benoît XVI s’exprimait en 2005, lors d’un colloque sur « Laïcité et liberté » en ces termes : « Un État sainement laïc devra logiquement reconnaître un espace dans sa législation à cette dimension fondamentale de l’esprit humain qu’est le sens du religieux. Il s’agit en réalité d’une « Laïcité positive » qui garantisse à tout citoyen le droit de vivre sa foi religieuse avec une liberté authentique y compris dans le domaine public. »

On voit bien ici la stratégie employée. Elle est de même nature que celle de la « Laïcité ouverte » utilisée en d’autres temps. Il s’agit de jouer sur le territoire de l’expression religieuse, sur son domaine de validité. La sphère privée pour le pape et le catholicisme anti-laïque n’est pas un lieu suffisant ; il faut pour eux reconquérir le domaine public, ensuite l’ensemble des services publics et à terme, certainement, les lieux même où se définit la loi.

Mais, à ce sujet, la loi de 1905 est très précise. Elle réaffirme une liberté fondamentale, la liberté de conscience et elle en précise son domaine : hors de la sphère publique. Car dans la sphère publique l’expression religieuse est par nature inégalitaire, elle établit des catégories aux droits différenciés, elle communautarise le vivre-ensemble (le croyant et l’incroyant, l’homme et la femme, le bien-pensant et le blasphématoire, le pur et l’impur, etc.). C’est pour cela que la République ne reconnaît, ne salarie et ne subventionne aucun culte.

Il convient donc de rester très vigilant. Le Pardem invite tous les citoyens à garder à l’esprit que le concept de « Laïcité positive » représente une attaque intellectuelle et politique sur la loi de 1905. Face aux offensives qui ne manqueront pas de se manifester, il sera résolument aux côtés des défenseurs de cette loi.

 

Modifier la législation

Ce processus se heurte à la législation laïque et républicaine française, il faut donc s’y attaquer. D’une part en reprenant l’idée papale de « Laïcité ouverte » (« J’en appelle à une laïcité positive, une laïcité qui respecte, qui rassemble, qui dialogue »), en reconnaissant les communautés religieuses comme des interlocuteurs de premier plan avec l’exécutif (comme l’UOIF), et en proposant de « toiletter » la loi de 1905. Ce dernier point a été l’objet du rapport Machelon, commandé en 2006 par N. Sarkozy alors ministre de l’Intérieur, qui prévoyait entre autres d’autoriser les communes à subventionner les lieux de culte, de favoriser la délivrance de reçus fiscaux par les associations cultuelles, et l’extension du concordat d’Alsace-Moselle à l’islam alsacien et mosellan.

Face à cette stratégie, le Pardem appelle de nouveau à une vigilance laïque sans concessions.  

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