Trump/Biden : impérial bonnet et bonnet impérial !

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Par Joël Perichaud, secrétaire national du Parti de la démondialisation chargé des relations internationales.
 

L’Union européenne (UE) attendait avec impatience le remplacement de D. Trump par J. Biden. Sans attendre la proclamation officielle des résultats, l’UE, ses thuriféraires et tous les atlantistes ont fait assaut de déclarations enthousiastes et serviles.
Mais les premières décisions prises par Biden et les personnalités nommées dans son équipe montrent qu’au-delà de la forme, le fond de la politique étatsunienne ne sera guère changé.

C’est la presse libérale européiste aux ordres qui a ouvert le feu. Der Standard (Autriche) s’est réjoui qu’une « nouvelle ère » s’ouvre, Le Figaro (France) a salué « la bonne nouvelle », Le Soir (Belgique) s’est félicité de l'arrivée d'un « guérisseur à la Maison Blanche », El País (Espagne) prédit « la re-construction de l’Occident » et Associated Press salue un nouveau président qui « balaie les années Trump ».

Chez les politiques, Angela Merkel attend avec impatience un « nouveau chapitre dans les relations de l'Allemagne avec les Etats-Unis ». Frank-Walter Steinmeier (président de la République fédérale d’Allemagne) a exprimé « son soulagement ». Emmanuel Macron a envoyé à Joe Biden et Kamala Harris ses « meilleurs vœux en ce jour le plus significatif pour le peuple américain », Antonio Guterres (secrétaire général de l’ONU) a appelé Biden « à proposer une nouvelle contribution nationale ambitieuse pour la lutte pour la paix dans les dix ans à venir », Boris Johnson est « impatient de collaborer avec le nouveau président américain ».

Encore plus pressés, les dirigeants des institutions européennes qui piaffaient d’impatience depuis des semaines à l’idée de voir se tourner la page maudite des années Trump n'ont pas attendu l'investiture du 46e président des États-Unis pour lécher les bottes de Biden.
Ursula von der Leyen (présidente de la Commission européenne) a déclaré devant le Parlement européen réuni en session plénière (ça valait bien ça…) « De nouveau, après quatre longues années, l'Europe a un ami à la Maison Blanche… Cette nouvelle aube en Amérique est le moment que nous attendions depuis si longtemps. L'Europe est prête pour un nouveau départ avec notre partenaire le plus ancien et le plus fiable ».

David Sassoli (président du Parlement européen) a lui aussi rappelé sa soumission : « Le monde a besoin d'une relation forte entre l'Europe et les États-Unis ».
Mais Charles Michel (président du Conseil européen) a fait plus fort et plus précis. Il pense (si, si…) « qu'il était temps de revenir aux convictions, au bon sens et de moderniser notre relation » et a lancé « un appel à construire ensemble un pacte fondateur, nouveau… Ce pacte fondateur couvre cinq priorités : lutte contre le changement climatique, renforcement de la coopération multilatérale, combat contre le Covid-19, reconstruction des économies, commerce équitable et transformation numérique et, bien sûr, nécessité d’'unir nos forces pour la sécurité et la paix… Ce nouvel agenda pour l'Europe et pour les États-Unis que nous souhaitons mettre sur la table est un agenda ambitieux, et c'est pourquoi, en ce premier jour de son mandat, je souhaite inviter le président Biden en Europe pour participer à une réunion extraordinaire du Conseil européen а Bruxelles, réunion qui pourrait se tenir en parallèle à un sommet de l'Otan ».

Mais derrière ces déclarations, diplomatiques et enflammées, qu’en est-il de la politique de Biden ?

Tout changer pour que rien ne change

Pour marquer sa différence, tant sur le plan national qu’international, Biden a signé, le jour de son investiture, 17 décrets qui reviennent sur des mesures de D. Trump. Voici les principaux :

- Retour des États-Unis dans l'accord de Paris sur le climat. Ça fait plaisir à l’UE et à Macron mais vu l’efficacité de l’accord non contraignant de Paris, rien ne change concrètement.

- Révocation du décret autorisant la construction de l'oléoduc Keystone (promesse de campagne). Ce projet de pipeline entre les États-Unis et le Canada, soutenu par Trudeau mais critiqué par les écologistes, avait été lancé en 2008, annulé une première fois par Barack Obama pour des raisons environnementales puis remis sur les rails par Donald Trump pour des raisons économiques. Avec la chute du prix du pétrole, cette opération n’est plus nécéssaire… Ni rentable.

- L'obligation du port du masque dans les bâtiments fédéraux, les transports entre les États et pour les fonctionnaires fédéraux. La politique sanitaire étant du ressort des États, la portée de cette mesure est faible.

- Mettre un terme au retrait de Washington de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS). Cette mesure est destinée à contrer la Chine qui occupe une place de plus en plus importante au sein de l’OMS.

- L'annulation du décret migratoire qui interdit aux ressortissants de pays en majorité musulmans d'entrer aux États-Unis. Il faut bien donner un signe positif aux pays arabes et du Golfe en particulier, alliés des USA et de l’OTAN.

- La suspension des travaux de construction d'un mur à la frontière avec le Mexique. Concession au gouvernement mexicain et aux multinationales qui profitent d’une main d’œuvre proche et exploitable. Joe Biden présentera aussi un projet de réforme migratoire, qui régularisera la situation d’environ 700 000 "Dreamers", ces jeunes adultes entrés clandestinement aux États-Unis pendant leur enfance et qui y ont toujours vécu depuis. Cette main-d’œuvre corvéable est déjà « intégrée » à la société américaine.

Ajoutons en mars le « Plan de sauvetage américain » de 1 900 milliards de dollars, troisième plan d'aides exceptionnelles pendant la pandémie, qui a été adopté aux forceps. Il est destiné à relancer les entreprises et la consommation intérieure car 18 millions d’Américains ont perdu leur emploi ou/et vu leurs revenus s’effondrer. Ce plan prévoit notamment des chèques de 1 400 dollars (après ceux de 1 200 dollars puis de 600 dollars envoyés par l'administration Trump) pour des millions d'Américains, ainsi que 350 milliards de dollars d'aide aux Etats et aux collectivités locales. Il comprend aussi des milliards de dollars pour lutter contre la pandémie, dont 49 milliards pour le dépistage et la recherche en plus de 14 milliards pour la distribution du vaccin. En revanche, la promesse de campagne de Biden de porter à 15 dollars de l'heure le salaire minimum est passée à la trappe...

Comme on le voit, rien de révolutionnaire sur le plan intérieur. Dans notre prochain envoi nous examinerons ce qu’il en est de la politique extérieure de l’administration Biden.