Salauds de pauvres !

... Le grand soir à l’envers ...

 

Nous y sommes.

François Fillon sera le candidat officiel de la droite « de gouvernement ».

Ah oui, il faut préciser : un parti « de gouvernement » est un parti qui a déjà été aux affaires et qui, de ce fait, est légitime à y revenir. Les autres, circulez, faut pas rester là, y’a rien à voir.

La primaire de droite, réunissant les riches, vieux et urbains, a donc clairement désigné son candidat. Et c’est du brutal :

 

  • un bond en arrière de 2 ans avec l’immersion de la Loi Taubira dans un bain d’eau bénite,
  • un bond en arrière de 30 ans avec l’application d’un programme qui a fait le bonheur de Reagan aux Etats-Unis, de Thatcher au Royaume-Uni et de Jacques Delors, dans les principes économiques de l’Union Européenne,
  • un bond en arrière de 35 ans avec le retour de la retraite à 65 ans.... en attendant mieux (Laurence Parisot rêve de 70 ans...),
  • un bond en arrière de 40 ans avec un œil inquisiteur sur le droit des femmes à disposer de leur corps (oui, « inquisiteur », c’est comme « inquisition », mais en plus sournois),
  • un bond en arrière de 70 ans avec la remise en cause de la Sécurité Sociale,
  • un bond en arrière de 80 ans (1936) avec la remise en cause de la semaine de 40 heures,
  • enfin, un bond en arrière d’un siècle avec un candidat à la Présidence de la République qui revendique et affiche sa foi catholique ; même le Général de Gaulle s’était abstenu d’un tel écart à la Loi de 1905.

Le « grand soir à l’envers » est arrivé ! Fillon le dit : le moment est venu de faire « les » réformes.

Oui, on dit « les » réformes et non « des » réformes. Faire « des » réformes supposerait qu’il peut exister différents plusieurs conceptions du monde. Mais faire « les » réformes montre qu’il n’existe qu’un seul type de réformes au service d’une seule et unique pensée : la pensée unique, celle de l’ortholibéralisme.

TINA : « There is no alternative », nous disait Margareth Thatcher.

 

... Au nom du « principe de réalité » et du pragmatisme ...

François Fillon nous le dit haut et clair à chaque interview : « Je suis un pragmatique ! »

Etre pragmatique, c’est accepter le monde tel qu’il est, et faire avec.

Etre pragmatique, c’est extraire le fer des Mines de Thionville entre 1914 et 1918 pour alimenter l’industrie de Guerre allemande grâce aux Accords secrets de Briey.

Etre pragmatique, c’est s’appeler Louis Renault et se faire photographier, fièrement, aux côtés d’Adolf Hitler.

Etre pragmatique, c’est intégrer l’Arabie Saoudite au Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU.

Etre pragmatique, c’est s’appeler LAFARGE et s’arranger avec DAECH pour faire prospérer un site de production de ciment à Jalabiya.

Etre pragmatique, c’est confier la direction de la BCE à un ancien dirigeant de Goldman-Sachs, tout en laissant l’ancien président de la Commission Européenne, José Manuel Barosso, rejoindre cette même institution financière.

Etre pragmatique, Monsieur Fillon, c’est pressentir Henri de Castries, ancien président d’AXA, membre de l’Institut Montaigne et président du Groupe de Bilderberg, pour diriger les finances de notre pays.

Et on pourrait ainsi multiplier les exemples.

Non, Monsieur Fillon, le pragmatisme n’est pas une vertu. C’est, au mieux une lâcheté, au pis un acte de complicité criminelle.

Ce que le monde compte de progrès et d’avancées est dû à des femmes et des hommes qui ont refusé la réalité et qui n’ont aucun sens du pragmatisme.

Il a fallu qu’un esclave arrache ses chaînes et les jette au visage de son maître pour que l’esclavage cesse d’être un ordre social normal.

Il a fallu qu’un ouvrier refuse de mourir au travail et exige de vivre décemment pour que le Droit social voie le jour.

Il a fallu qu’un obscur Général français prenne la parole un certain 18 juin 1940, alors que la réalité du pays était celle de la soumission et de la collaboration, pour que l’espoir renaisse.

 

... Salauds de pauvres ! ...

Au fond, le programme de François Fillon s’adresse aux pauvres, ces salauds de pauvres ! Ce programme ne vise rien d’autre que de sensibiliser ces salauds de pauvres aux réalités économiques du monde d’aujourd’hui.

Le pragmatisme, le principe de réalité : voilà la vraie voie !

Des salauds de pauvres qui se révèlent incapables de comprendre qu’il faut en finir avec l’ISF !

Dans le même temps, des salauds pauvres qui refuseraient une hausse de la TVA de 2% alors qu’ils sont si nombreux !

Des salauds pauvres qui auraient le mauvais goût d’attraper la grippe pendant l’hiver et qui, en plus, voudraient être soignés gratuitement !

Des salauds pauvres qui n’auraient pas le tact de mourir vite, dès que leur vie professionnelle est achevée !

Des salauds de pauvres qui rêvent d’une sécurité de l’emploi pour faire des projets d’avenir ! Un comble !

Des salauds pauvres qui manquent de culture économique au point de ne pas être capable d’accepter que le revenu moyen des patrons du CAC représente 250 fois le SMIC, voire 1 300 pour les plus talentueux !

Un grand bond en arrière, réalisé au nom du principe de réalité pour mettre au pas les salauds de pauvres : voilà le programme de François Fillon.

Ce programme sonne comme une revanche sur les progrès sociaux de ces 80 dernières années.

 

... La révolte qui gronde ...

Continuez, Monsieur Fillon, poursuivez dans cette voie.

Ignorez l’Histoire et ses enseignements.

Pliez-vous au Marché et aux règles du libéralisme le plus brutal.

Et relisez La Boétie....