En mai 2016, l’Américain Ormat fera main basse sur la centrale géothermique de Bouillante (Guadeloupe)

Cette opération, menée de main de maître par le gouvernement français, devrait brûler les mains de la population et des élus. Mais ni les élus de Guadeloupe, ni les syndicats, ni la population n’ont eu leur mot à dire.

Accusée d’être mal gérée, avec des coûts de production trop élevés... comme d’habitude... la chanson est connue, mille fois entonnée pour livrer au privé les entreprises qui, le lendemain, feront d’énormes bénéfices. Cette fois, la victime est la centrale géothermique de Bouillante en Guadeloupe qui produit 6% de l’énergie de l’archipel. Plutôt que d’investir et de garder dans le giron public cette ressource locale, propre et inépuisable, Ségolène Royal et Emmanuel Macron ont approuvé l’accord signé, à la Cop 21, qui cèdera la centrale en mai 2016 à l’entreprise Ormat.

Bien sûr, ni les élus de Guadeloupe, ni les syndicats, ni la population, n’ont eu leur mot à dire.  
 

Les coulisses d’un tour de passe-passe


En 2014, Ségoléne Royal, ministre de l’Environnement, visite la centrale thermique de Bouillante dans le cadre du projet de loi sur la transition énergétique. Lors de la visite officielle, François Demarq (Pdg) explique sa stratégie à la ministre. Il assure que la géothermie apporte une « contribution majeure à la transition énergétique et qu’il a des projets de développement ambitieux, notamment une usine dite Bouillante 3, à l’étude ».

Sur le site internet du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM)* on peut lire : « des interrogations demeurent sur le modèle économique, l’équilibre financier du site et la recherche d’investisseurs... ». En réalité, le BRGM a déjà trouvé un repreneur pour la centrale de Bouillante.

En avril 2015, Ségolène Royal annonçait, dans le cadre de la loi sur la transition énergétique, la création d’un fonds de développement de la géothermie (Geodeep). Proximité de la Cop 21 oblige, l’Etat allait investir 50 millions d’euros pour développer la géothermie.

Huit mois plus tard, la vente, pour une somme voisine (52 millions d’euros), est annoncée. Ormat Technologies, entreprise nord américaine de la « Green energy », s’offre la seule centrale géothermique opérationnelle sur le territoire français.

C’est donc cette entreprise basée à Reno (Nevada) qui contrôlera 85% du capital de la centrale géothermique de Bouillante. Celle-ci, construite par EDF à la fin des années 1970 et raccordée au réseau en 1986, appartient à la société SAGEOS filiale du Bureau de recherche géologiques et minières (BRGM). L’eau, à plus de 150 degrés, est puisée en profondeur ; la chaleur récupérée actionne les turbines qui produisent de l’électricité. C’est une énergie renouvelable et non polluante. Actuellement la centrale produit 6% de l’énergie consommée en Guadeloupe, mais son potentiel va bien au-delà. Le projet d’Ormat est de multiplier par trois la quantité d’énergie produite en passant 14,7 MW à 45 MW d’ici 2021. Il s’agit donc d’installations qui, dans moins de 10 ans, pourraient fournir près de 20% de l’énergie consommée en Guadeloupe.

La centrale géothermique de Bouillante, nécessaire à la souveraineté énergétique de la Guadeloupe, devait rester dans le service public ! Mais le gouvernement, toujours prompt à bien servir les intérêts des patrons et des néolibéraux, ne l’a pas entendu de cette oreille. Qui s’en étonnera ?

La cop 21 n’aura décidément accouché d’aucun progrès : ni environnemental, ni social, ni économique pour les peuples et beaucoup servi le capital et le libre échange.

*BRGM : Bureau de recherches géologiques et minières, établissement public de référence dans les applications des sciences de la Terre. Sageos, propriétaire de la centrale de Bouillante, est une filiale du BRGM.

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