Le sommet de l’OTAN à la botte des États-Unis

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Contre-sommet otan - Madrid 11

 

Du 28 au 30 juin 2022, quarante chefs d’État se sont réunis à Madrid pour le sommet de l’OTAN, convoqués par les USA afin de faire “approuver” sa stratégie guerrière globale. Imperméables aux protestations du contre-sommet organisé par de nombreuses organisations, ils ont entériné les directives de leur maître étasunien et de son bras armé, l’OTAN.

Prétextant la guerre en Ukraine, qu’ils ont eux-mêmes souhaitée et qu’ils alimentent à jet continu d’armes et de “pognon de dingue”, ils ont clairement désigné la Russie comme l’ennemi alors “qu’en même temps” l’adhésion de la Finlande et de la Suède, qu’ils espéraient depuis longtemps, était “examinée”. L’attitude de l’OTAN envers la Chine, qualifiée de « défi systémique », a été aussi exposée au public pour justifier les mesures décidées à l’avance à Washington.
Macron, le retourneur en chef de veste aux étoiles européennes n’a pas reparlé de « mort cérébrale » de l’OTAN mais célébré  « l’unité, la solidarité et la solidité de l’OTAN ». Alleluia…
Mais au-delà de l’ironie, c’est grave, c’est dangereux, c’est cher !

La guerre en Ukraine : un soutien sans faille de l’OTAN

Le soutien à Zelensky, à son régime corrompu et à ses milices néonazies a été la grande affaire de ce sommet, même si, officiellement, l’OTAN n’est pas directement impliquée dans le conflit. Pourtant, bien avant l’annexion de la Crimée (2014), l’OTAN n’a jamais cessé de s’étendre à l’Est, de provoquer la Russie. Il apporte un soutien politique, financier et en armes au régime de Kiev, par le biais des États (USA, et États membres de l’UE).
De 2010 à 2022, la Russie est passée du statut de “partenaire”, avec qui il fallait coopérer, à celui de menace. C’est la politique américaine, l’OTAN et le non-respect des accords de Minsk (I &II) par l’Ukraine, l’Allemagne et la France qui ont conduit à l’opération russe en Ukraine et en particulier dans le Donbass. Ce conflit risque de durer puisque les protagonistes “occidentaux” refusent un compromis possible et ont décrété des “sanctions” pour provoquer (sans espoir de réussite) l’effondrement de l’économie russe (comme l’affirme Bruno Le Maire). Le camp de ceux qui veulent la victoire finale de l’Ukraine et sont prêts à se battre jusqu’au dernier russe (États-Unis, Grande-Bretagne, Pologne, Pays Baltes…) l’a emporté. La formule de B. Johnson résume bien cette perspective : « Toute tentative de régler le conflit maintenant ne ferait que causer une instabilité durable ».

Adhésion de la Finlande et de la Suède à l’OTAN

Ces deux pays neutres bénéficiaient déjà, comme membres de l’UE, d’une clause de défense (art.42.7) suffisante pour eux-mêmes, mais pas pour l’OTAN. Si la coopération avec l’Alliance n’est pas vraiment une nouveauté, il fallait parachever l’intégration et la mainmise totale des États-Unis par une adhésion formelle. Sur le plan géopolitique, les choses sont claires : l’OTAN est frontalière avec la Russie. Provocation inacceptable pour les Russes. Quant aux peuples des pays de l’Union européenne, tout le monde s’en fout ! Leur avis ne compte pour rien et ils paient la facture.
Dans un premier temps, Erdogan s’est opposé aux adhésions de la Finlande et de la Suède. Son objectif était d’obtenir des engagements de ces pays contre les Kurdes du PKK (Turquie) et du PYD (Syrie), engagés dans la lutte contre Daesh, et la possibilité d’extradition de réfugiés politiques, la levée de l’embargo sur des ventes d’armes… et un feu vert pour l’invasion du Rojava. Rien de choquant pour l’OTAN et ses affidés… Ayant obtenu satisfaction, Erdogan a alors levé son véto au processus d’adhésion.
Résultat : la Finlande et la Suède deviennent le nouveau front de l’OTAN .

Nouvelle ère stratégique

Le sommet de l’OTAN à Madrid  a adopté un document de référence qui fixe les orientations des membres de l’Alliance militaire et nucléaire pour les dix prochaines années. L’objectif est de passer d’un rôle régional à un rôle global, planétaire, puisque l’OTAN pourra intervenir sur toutes les latitudes et notamment contre la Chine.
L’augmentation des dépenses militaires qui vont dans ce sens a donc été approuvée. Le Secrétaire général de l’OTAN a repris les propos de Trump - qui pourtant à l’époque, avaient “contrarié” les pays membres - la contribution de 2% du PIB par pays n’est plus un plafond mais un plancher… L’OTAN et les USA font payer leur (pseudo)  protection au prix fort… Signe d’une organisation de type mafieux, non ?
Et, pour « promouvoir des technologies militaires émergentes », l’OTAN va « approfondir ses relations avec le secteur privé ». Les grandes firmes d’armement US (le complexe militaro-industriel) se frotte les mains : elles seront les grandes bénéficiaires du “pognon de dingue” déversé par les États dans les soutes de l’Alliance…
Fini (pour combien de temps ?) le débat sur l’autonomie stratégique européenne en matière de défense. Mais qui y avait cru une seconde ?

Les pays de l’Union européenne occupés…

Ce sommet de Madrid marque un renforcement, sans précédent depuis la fin de la guerre froide, de la présence de l’OTAN sur le front Est de l’UE.
Les effectifs de 40 000 hommes seront portés à 300 000 au travers de la Force de Réaction (NRF). Huit nouveaux groupements tactiques seront déployés dans les pays baltes, en Bulgarie, en Hongrie, en Slovaquie et en Roumanie. Les États-Unis renforceront leurs contingents en Pologne, enverront une quarantaine de F35 au Royaume-Uni et deux destroyers en Espagne.
Ce retour d’une occupation conséquente s’inscrit dans une stratégie à plus long terme et autrement plus déterminante pour les USA, celle visant la Chine.

… et à la botte

La présence de pays non membres de l’OTAN (Japon, Corée du Sud, Australie et Nouvelle Zélande) lors du sommet de Madrid est le signe évident que la Chine est au centre d’une stratégie de containment.
La vision d’une zone d’action de l’OTAN circonscrite à la zone euro-atlantique a volé en éclats. En effet, l’UE, chien fidèle des USA, a déclaré que la Chine, qui n’est pas un adversaire militaire, est un « rival systémique »… L’UE est entrée dans la croisade étasunienne contre la Chine.
Bien que les USA maquillent, une nouvelle fois, cette offensive par une justification idéologique (alliance des démocraties contre les régimes autoritaires : Chine, Russie, Iran), la compétition systémique avec la Chine pour la suprématie mondiale est patente.

Les peuples de l’UE n’ont rien à gagner dans ces affrontements. C’est même un piège dangereux. La vision du monde des États-Unis et de l’OTAN, celle d’un Occident contre le reste du monde, n’est sûrement pas celle des peuples. Le refus des pays africains de soutenir la politique des USA, de l’OTAN et de l’UE en Ukraine l’a clairement exprimé.

La macronie à la manœuvre

Macron, bon soldat du néolibéralisme, a parfaitement joué son rôle : accord inconditionnel avec les États-unis et l’UE. Et si ses grandes déclarations étaient destinées à convaincre d’une (improbable) autonomie de pensée et d’action, en réalité, elles ne montrent que son impuissance, sa duperie et au final son allégeance.
La macronie est donc favorable à l’adhésion de la Finlande et de la Suède à l’OTAN, s’est conformée à la volonté US de “containment” de la Chine et soutient, de fait, les concessions faites à la Turquie contre le peuple Kurde.
La macronie a réitéré son engagement à livrer des armes à l’Ukraine (véhicules blindés, canons Caesar, missiles Exocet…) et augmentera le budget militaire de la France qui se traduira par l’achat de matériels et d’équipements américains portant ainsi un nouveau coup à l’industrie française de défense… Ne parlait-il pas de souveraineté le Jupiter d’hier auto labellisé aujourd’hui Vulcain ?

La guerre est toujours payée par les populations

Ce sommet de l’OTAN marque une étape dangereuse, une escalade guerrière voulue par les USA, tournant le dos à la diplomatie et à la recherche de la paix, avec l’appui de la macronie. Les conséquences risquent d’être funestes pour les peuples qui n’ont jamais la parole. Plus que jamais, la France doit sortir de l’OTAN afin de pouvoir œuvrer pour sa disparition et agir en faveur de la sécurité collective, de la paix et de la coopération internationale dans le respect de la souveraineté de tous les peuples. Plus on attend, plus le risque est grand. C’est bien ce qu’ont clamé les milliers de participants au contre-sommet de Madrid. Mais qui les a entendus ? Quel média a informé de leur mobilisation ? Quelles forces politiques françaises « progressistes et pro démocratie » leur ont apporté un soutien ?
Notre pays est dans le déni du danger des va-t-en guerre, tout à la compassion avec les Ukrainiens qui ont dû fuir leur domicile, quitter leur travail, leur famille, leurs amis, s’exiler. L’Union européenne fait la généreuse en créant pour ces migrants réfugiés un statut particulier afin de faciliter leur intégration dans les pays d’accueil. Il faut bien faire mine de se présenter en costume du bien ici au nom de la solidarité alors que l’on travaille en coulisse à l’organisation du conflit et à son extension tout en songeant déjà aux gains futurs de la « reconstruction » de l’Ukraine dont les terres, les industries, les équipements publics, les hôpitaux, etc., sont détruits. Non l’Union européenne n’est pas solidaire des Ukrainiens. Elle n’agit que pour les intérêts de ses actionnaires. L’Ukraine est un pays martyr si l’on considère ses habitants. Elle est une « opportunité » si l’on considère les avantages qu’offre la guerre menée par les classes dominantes. Nous y sommes. Hélas.
« L’Europe c’est la paix » devrait définitivement être jetée aux poubelles de l’histoire. Mais les mythes ont la vie dure. Leur vertu est notamment de masquer le réel. On peut faire confiance à ceux qui entretiennent le mythe européen de ne pas lâcher le morceau. Y a-t-il encore un peuple prêt à les croire ? A quel prix ?