Bérézina pour l’environnement et la santé : Commission, Conseil et parlement tous unis

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Par Michèle Dessenne, présidente du PARDEM

Non seulement la Commission européenne et le Conseil européen (1) ont prolongé mi-novembre l’autorisation du glyphosate de 10 ans, jusqu’à 2033 (1bis),  mais, dans la foulée, le parlement européen a voté contre un texte inclus dans le Pacte vert prévoyant une baisse de 50 % de l’usage des produits phytosanitaires d’ici à 2030, Et poc !
Mais attention, ce n’est pas tout. De nouveaux types d’OGM sont sur le point d’être adoubés par ce même parlement.
Alors, qui peut encore nier que l’Union européenne, qui se présente comme le chantre de la défense de l’environnement avec son « green deal », ses bagnoles électriques et ses éoliennes, ment effrontément, embobine les citoyens. Comble de l’ironie, elle a objectivement pour complices les partis écologistes, les plus accro à un fédéralisme européen et les plus fervents adversaires de la nation. Macron n’est pas en reste, toujours prompt à faire le premier de la classe européiste, qui a revendiqué en mai dernier  « une pause sur les règlementations environnementales au niveau européen », lui qui s’était paré de paillettes vertes !
Las. La protection de l’environnement passe par perte et profit… La santé des peuples avec. Celles des générations à venir aussi. Main dans la main, Commission, Conseil et Parlement européen choisissent le profit sonnant et trébuchant plutôt que la biodiversité et la santé.
On ouvre les yeux et on regarde le réel. Revenons sur les faits édifiants de ces dernières semaines et les peines prononcées à l’encontre des 450 millions d’habitants de l’Union européenne, condamnés à ingérer pesticides et OGM. Sans aucune prévention possible pour leur santé.

L’UE montre son vrai visage, Macron sert la soupe, l’Assemblée nationale fait la plonge !

Côté Union européenne, pschitt le Pacte vert européen et notamment la partie intitulée De la ferme à la table (2). Le Parlement européen a voté non à la réduction de 50% des pesticides d’ici 2030. Même Le Monde s’en émeut : « En votant majoritairement contre la réglementation prévoyant une baisse de 50 % de l’usage des produits phytosanitaires d’ici à 2030, les eurodéputés ont sabordé, mercredi, l’un des éléments centraux du Green Deal et de son pendant agricole. ». Le groupe conservateur du Parti populaire européen (PPE), lui, s’est félicité du vote, saluant dans un communiqué le fait que le Parlement ait rejeté une "approche extrémiste" des Verts et de la gauche destinée à « imposer toujours plus d'interdictions et de réglementations excessives qui auraient réduit la production alimentaire en Europe ».

La suite ? Le Conseil européen peut désormais abandonner le texte ou le soumettre en deuxième lecture aux eurodéputés, qui ont voté à 299 voix contre 207 (plus 121 abstentions) en défaveur de cette mesure qui avait donné lieu à d'intenses négociations pendant des mois et fait l’objet de nombreux amendements affaiblissant sa portée.
Notons qu’il n’est pas coutume que le Parlement européen rejette un texte de la Commission et du Conseil européen. La plupart du temps tout passe velours. Mais là oh, oh ! Le texte a été jugé nocif pour le business de l’agroalimentaire. Ouf ! Heureusement que le Parlement est un pare-feu aux égarements de la Commission et du Conseil ! Plus néolibéral que la Commission, fallait oser ! Les députés européens ont montré leur utilité au service de leurs électeurs…
Les élections européennes arrivant à grands pas, les partis écologistes n’en démordent pourtant pas. Selon eux et quoiqu’il arrive, l'écologie doit passer par l’UE. Peu importe la réalité de la politique néolibérale menée, ils veulent toujours plus « d’Europe » pour mieux lutter contre le changement climatique et les désastres subis par la biodiversité qui menacent la santé et la vie humaine. Leur cécité à l’égard de la nature même du Parlement européen, de la corruption organisée par les lobbys des multinationales agroalimentaires, et plus largement le fonctionnement  anti-démocratique de l’Union européenne est plus forte que tout. Ils persistent et signent tout en pleurant à chaudes larmes sur les décisions prises. Les « Renaissance »  qui orchestrent les destructions sociales, économiques et environnementales, tout comme les LR et la bande de centristes, n’en sont pas moins les premiers coupables, par leurs votes au parlement européen, au Sénat et à l’Assemblée nationale. Quant au RN…

« Souvent président varie, Bien fol est qui s'y fie ! Un président souvent n'est qu’une plume au vent ! » (3).

Côté national, la tragicomédie n’a rien à envier à l’UE (pas étonnant si on admet que le gouvernement et le Parlement sont emprisonnés par le Traité de Lisbonne depuis 2008). A cela s’ajoutent les zélés. Souvenez-vous. En 2017, Emmanuel Macron, tout fiérot, s’était engagé à sortir du glyphosate dans les trois ans. En 2022, tout penaud, il déclarait avoir commis « l’erreur » de croire la France capable de se passer seule de ce désherbant. Au printemps 2023, le même homme en rajoutait une louche en faisant un appel « à faire une pause sur les règlementations environnementales au niveau européen ».
Toujours est-il que ses désirs ou ceux de ses cabinets conseils ont dépassé ses espérances. L’UE, en effet, fait mieux que marquer une pause : l’intelligence artificielle a permis que le bouton « delete », se déclenche. L’antivirus installé par les européistes pour servir exclusivement politiques néolibérales et profits maxi pour les multinationales et la finance avait lancé l’alerte rouge. Il fallait donc faire fissa et supprimer les programmes malveillants. C’est ainsi que la protection de la biodiversité et le principe de précaution trinquent. Et cela quasi au même moment où se déroule la célébration de la grand-messe COP 28 à Dubaï City, accompagnée des gloussements de satisfaction des chefs d’État en voyage organisé à la chaleur du pétrole et du béton comme le montre la photo de Dubaï illustrant cet article, et où près de 2 500 lobbyistes des énergies fossiles ont obtenu une accréditation pour la conférence, selon une coalition d’ONG. À première vue cela ne semble pas bien synchronisé toutefois l’arbre pouvant cacher la forêt...

Nouveaux OGM : ils arrivent à grande vitesse dans nos assiettes

La dernière alerte connue concerne l’entrée en vigueur des nouveaux OGM, dénoncée par un collectif d’organisations qui la qualifie « d'offensive sans précédent des multinationales agro-chimiques et agro-génétiques sur notre santé et l’environnement se préparant actuellement dans les arcanes de l’Union européenne à Bruxelles ». Il explique que « Sous l’influence directe des lobbys agro-génétiques et industriels, l’Union européenne s’apprête à faire sortir une nouvelle génération d’OGM potentiellement dangereux pour les abeilles, les pollinisateurs sauvages et l’ensemble des écosystèmes, du cadre législatif mis en place depuis des années afin de protéger les citoyens européens et la nature face aux dangers des OGM et de garantir la liberté de choix des consommateurs ».  Cette coalition d’ONG, d’agriculteurs et de distributeurs, a donc lancé une mobilisation pour y faire barrage et une pétition en urgence appelant les députés européens à ne pas voter le texte (4).
Dès le 5 juillet 2023, Que Choisir analysait ce texte. Il l'accusait d'être une  « immense revanche des firmes semencières et des promoteurs des OGM. La Commission européenne a présenté le 5 juillet son projet de règlement sur les nouveaux OGM, dits « NGT » (new genomic techniques). Ce texte ouvre largement les portes de l’Union européenne (UE) aux plantes produites par les techniques les plus récentes de génie génétique. Ainsi, la Commission propose de créer deux catégories de NGT » (5).

Le Parlement français dit oui au fédéralisme européen

En cerise sur la gâteau et pour vous accompagner sur le chemin de la douloureuse rupture avec les mystifications entretenues par l’Union européenne, nous publierons très prochainement un article sur le texte voté par le Parlement français qui ouvre grand les portes au fédéralisme européen. Avec lui la boucle continuera d’être bouclée. Le citoyen sera totalement démuni de recours, enchaîné aux décisions d’une structure supranationale :  l'Union européenne néolibérale.
Décidément, il est vital, au sens propre, de sortir des illusions et du discours mielleux de l’Union européenne : elle ne pourra jamais conjuguer néolibéralisme et protection de l’environnement et de la santé parce que ces termes sont incompatibles et même antinomiques… Et pendant que vous lisez ces lignes des centaines de milliers de tonnes de marchandises circulent sur les océans pour nous livrer des objets inutiles ou ceux dont nous avons parfois besoin mais que la France ne produit plus ! Faut se réveiller amis lecteurs et lectrices. Notre salut est dans la liberté, la souveraineté populaire et nationale et la démondialisation.

En guise de conclusion, provisoire, nous vous demandons de participer : si parmi vous certains et certaines peuvent expliquer le fonctionnement des institutions européennes (Commission, Conseil et Parlement européen, leurs rôles, leurs pouvoirs et leurs actions) n’hésitez surtout pas à déposer votre contribution  dans un commentaire. Cela aidera les citoyens à se repérer. Bon courage !

NOTES
1. Les membres du Conseil européen sont les chefs d'État ou de gouvernement des 27 États membres de l'UE, ainsi que le président du Conseil européen et la présidente de la Commission européenne. Le Conseil européen définit les orientations et les priorités politiques générales de l'UE. N'étant pas l'une des institutions législatives de l'UE, il ne prend pas part aux négociations sur la législation de l'UE ni à l'adoption de celle-ci. En revanche, il établit le programme d'action de l'UE. Il adopte en général, lors des réunions du Conseil européen, des "conclusions" qui mettent en évidence des sujets de préoccupation et les mesures à prendre.
1bis :  Règlement d’exécution (UE) 2023/2660 de la Commission du 28 novembre 2023 https://eur-lex.europa.eu/eli/reg_impl/2023/2660/oj?locale=fr
2. Green deal, alias Pacte vert : « L'avenir de l'Europe dépend d'une planète en bonne santé. Les pays de l'UE sont déterminés à atteindre la neutralité climatique d'ici à 2050, respectant ainsi les engagements pris dans le cadre de l'accord de Paris. Le pacte vert pour l'Europe est la stratégie mise en œuvre par l'UE pour réaliser l'objectif à l'horizon 2050. » https://www.consilium.europa.eu/fr/policies/green-deal/
Lire aussi : https://data.consilium.europa.eu/doc/document/ST-12099-2020-INIT/fr/pdf
3. Libre adaptation d’une citation d’origine sexiste…
4. Nouveaux OGM : https://www.quechoisir.org/actualite-nouveaux-ogm-le-marche-europeen-s-ouvre-en-grand-n108830/
5. Vidéo explicative :: https://info.pollinis.org/pollen-empoisonne/  
" Une autorisation prématurée de ces technologies invasives et incontrôlables pourrait anéantir tous les efforts des agriculteurs qui œuvrent depuis des années au développement d’une agriculture sans intrants chimiques ou génétiques, et bafouer le droit des consommateurs à une alimentation naturelle sans OGM."
 

Pour signer la pétition : https://mobilisation.pollinis.org/nouveaux-ogm-caches/