Le 15-04-2016
Par le Parti de la démondialisation (Pardem)
Les 13 et 14 décembre 2008 le Conseil européen, réuni à Bruxelles, a décidé de bannir le suffrage universel.
Le week-end des 13 et 14 décembre 2008 restera marqué d’une pierre noire dans l’histoire de la « construction » européenne. Le Conseil européen, réuni à Bruxelles et rassemblant les 27 chefs d’État et de gouvernement de l’Union européenne, a décidé de bannir le suffrage universel. Le nom de Nicolas Sarkozy, président en exercice de l’Union européenne, sera indissolublement associé à cet attentat contre la souveraineté populaire, la démocratie et les droits de l’Homme.
Comment, en effet, qualifier l’attitude des oligarques bruxellois qui viennent d’obtenir d’un Premier ministre irlandais d’une particulière veulerie – Monsieur Brian Cowen – qu’il organise un nouveau référendum dans ce pays puisque le premier, tenu en juin 2008, ne répondait pas aux critères de l’eurolibéralisme ?
L’Union européenne confirme sa volonté de poursuivre sa « construction » en renonçant au suffrage universel
Alors que le référendum avait été rendu impossible par les autres États (en France par les partis pro-système comme l’UMP, le MoDem, la majorité du PS et des Verts), la Constitution irlandaise imposait un référendum pour la ratification d’un nouveau traité européen. C’est pourquoi un référendum s’est tenu en juin 2008, à l’occasion duquel les Irlandais ont nettement rejeté le Traité de Lisbonne (53,04% de NON). Ce traité était lui-même la copie conforme du traité constitutionnel européen rejeté en 2005 par les Français et les Néerlandais.
Dès lors, conformément au droit international et au droit européen, ce traité devenait caduc. Pourtant, au Conseil européen des 19 et 20 juin 2008, il fut décidé de continuer de poursuivre le processus de ratification. C’était un coup d’État ! L’Union européenne, après le sommet de mi-décembre 2008, vient de confirmer qu’elle se mettait au même niveau que les républiques bananières en devenant chaque fois un peu plus un ensemble de non droit.
Depuis juin 2008, les pressions, manœuvres, chantages, tractations de toutes sortes s’étaient multipliés pour obtenir des autorités irlandaises qu’elles décident d’un nouveau référendum.
Le Premier ministre irlandais a cédé en acceptant d’organiser un nouveau référendum sur le Traité de Lisbonne avant fin octobre 2009. En contrepartie il a obtenu l’accord de principe que le Conseil européen adopterait une déclaration faisant de l’Irlande un cas à part au sein de l’Union européenne. C’est ainsi que le Traité de Lisbonne ne s’appliquera pas totalement à l’Irlande, si les Irlandais, cette fois-ci, votent OUI :
- La neutralité militaire de l’Irlande serait respectée (par parenthèse, ceux qui croient encore au mythe de l’Union européenne comme facteur de paix devraient s’interroger sur le Traité de Lisbonne qui fait du lien avec l’OTAN un aspect décisif de la « construction » européenne).
- L’autonomie fiscale demeurerait.
- L’interdiction de l’avortement ne serait pas remise en cause.
- L’Irlande conserverait son commissaire européen.
Sur ce dernier point, l’Union européenne a renoncé à ce qu’elle considérait comme l’un des acquis décisifs du Traité de Lisbonne. La Commission européenne, organe supranational censé incarner l’introuvable intérêt commun européen, continuera donc à compter un représentant par État membre alors que le Traité de Lisbonne, comme celui de Nice, prévoit de réduire ce nombre. Le Traité de Lisbonne prévoit ainsi qu’en 2014 la Commission sera constituée d’un nombre de commissaires correspondant aux deux tiers du nombre d’États membres (environ une vingtaine). Ce n’est plus qu’un souvenir…
Ce coup de force est en contradiction flagrante avec les textes publiés par l’Union européenne sur la démocratie et les droits de l’Homme, dont l’abondance est inversement proportionnelle à la pratique démocratique des institutions européennes. Il parait que le Traité de Lisbonne lui-même devrait rendre l’Union européenne plus démocratique… Le droit de pétition, dont les partisans du OUI avaient fait un symbole de la démocratie européenne, se voit ainsi ravalé à ce qu’il était dès le départ : un chiffon de papier. Comment de telles institutions pourraient-elles répondre à des pétitionnaires lorsqu’elles refusent de répondre à un peuple s’exprimant par référendum ? Pour le système de Bruxelles, la démocratie et le suffrage universel n’étaient que des fardeaux, des boulets qu’ils trainaient aux pieds dont ils viennent de se séparer.
Le bla-bla sirupeux sur les droits de l’Homme, les droits sociaux et la démocratie servent à masquer la poigne de fer dans laquelle les classes dirigeantes tiennent l’Union européenne.
Si les Irlandais votent OUI, le traité de Lisbonne entrera donc en vigueur le 1er janvier 2010. Mais que ce serait-il passé si le peuple irlandais avait voté NON une nouvelle fois ? Car dans les causes du premier NON irlandais, les oligarques européens et la classe dirigeante irlandaise oublient le mécontentement de la population généré par la crise du capitalisme néolibéral.
En réalité, les promesses faites à l’Irlande n’étaient que de la monnaie de singe
Le Conseil européen de mi-décembre a donc « débattu des éléments destinés à répondre aux préoccupations exprimées lors du référendum irlandais et a défini une démarche afin de permettre au Traité de Lisbonne d’entrer en vigueur avant la fin de 2009 ». Voir les conclusions du Conseil :
http://www.consilium.europa.eu/ueDocs/cms_Data/docs/pressData/fr/ec/104669.pdf
En ce qui concerne la composition de la Commission
En réponse à la demande de l’Irlande du maintien d’un commissaire irlandais, le communiqué du Conseil européen a rappelé que les traités en vigueur « exigent la réduction du nombre des membres de la Commission en 2009 ». Le Conseil européen, dans son communiqué du 14 décembre 2008, « convient que, à condition que le traité de Lisbonne entre en vigueur, une décision sera prise, conformément aux procédures juridiques nécessaires, pour que la Commission puisse continuer de comprendre un national de chaque État membre. » Traduction : le Conseil européen conditionnait le maintien d’un commissaire européen irlandais si l’Irlande vote le Traité de Lisbonne. Cela s’appelle du chantage ! Mais il y a encore plus grave, car même si les Irlandais avaient accepté ce chantage, ils n’auraient pas été certains de conserver leur commissaire. Selon le Traité de Lisbonne, en effet, chaque État membre possède un droit de veto. Il n’y avait donc strictement aucune garantie pour que l’Irlande conserve un commissaire. Sur le plan juridique, la question des commissaires est abordée dans l’article 17, alinéa 5 du Traité de Lisbonne : « À partir du 1er novembre 2014, la Commission est composée d’un nombre de membres, y compris son président et le haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, correspondant aux deux tiers du nombre d’États membres, à moins que le Conseil européen, statuant à l’unanimité, ne décide de modifier ce nombre. » Les Irlandais n’avaient donc aucune garantie.
En ce qui concerne la demande de l’Irlande de conserver son régime fiscal
Rappelons que celui-ci est fondé sur le dumping. Le Conseil a estimé que « aucune des dispositions du Traité de Lisbonne ne modifie en quoi que ce soit, pour aucun État membre, l’étendue ou la mise en œuvre des compétences de l’Union dans le domaine fiscal. » C’est donc que l’Union renonce à mener des politiques communes en matière fiscale !
En ce qui concerne la demande de l’Irlande de conserver sa neutralité militaire
Le Conseil a estimé que « le traité de Lisbonne n’affecte pas la politique de sécurité et de défense des États membres, y compris la politique traditionnelle de neutralité de l’Irlande, ni les obligations de la plupart des autres États membres. » En vérité, le Traité de Lisbonne est contradictoire avec ce qu’affirme le Conseil. C’est ainsi que l’article 42, alinéa 3 du Traité de Lisbonne stipule : « Les États membres mettent à la disposition de l’Union, pour la mise en œuvre de la politique de sécurité et de défense commune, des capacités civiles et militaires pour contribuer aux objectifs définis par le Conseil. Les États membres qui constituent entre eux des forces multinationales peuvent aussi les mettre à la disposition de la politique de sécurité et de défense commune. Les États membres s’engagent à améliorer progressivement leurs capacités militaires. »
En ce qui concerne la demande de l’Irlande de conserver son interdiction de l’avortement
Le Conseil a estimé que « une garantie que les dispositions de la Constitution irlandaise concernant le droit à la vie, l’éducation et la famille ne sont pas du tout affectées par l’attribution par le traité de Lisbonne d’un statut juridique à la Charte des droits fondamentaux de l’UE et par les dispositions dudit traité relatives à la justice et aux affaires intérieures. » En réalité, traité de Lisbonne ou pas, l’Irlande fera ce qu’elle veut, comme chaque pays de l’Union sur ces questions.
Au total, les prétendues « garanties juridiques nécessaires » apportées par le Conseil européen pour arracher la décision d’un nouveau référendum en Irlande n’étaient que de la monnaie de singe. Les Irlandais, hélas, sont tombés dans le panneau.
Ce coup d’État confirme qu’il faut construire une nouvelle union européenne, celle des peuples et des nations de toute l’Europe, et sortir de cette Union européenne
Face à ce coup d’État et à cette évolution autoritaire de l’Union européenne, la gauche et la droite du OUI sont restées muettes. Quant à la gauche et à la droite du NON elle n’a pas repris le flambeau qu’elle avait si bien tenu en 2005 lors du traité constitutionnel européen. C’était pourtant la condition pour prouver son efficacité aux yeux de l’opinion publique et pour créer les conditions politiques d’un renversement de la situation.
Comme elle l’a toujours été avec la « concurrence libre et non faussée » comme principe fondateur, l’Union européenne se réduit à n’être qu’une machine à fabriquer du néolibéralisme, de l’abstention, de la désespérance, du nationalisme, du racisme et de la xénophobie, de l’extrême droite… Elle suscite des émeutes de la jeunesse en Grèce et des violences néonazies en Allemagne. Elle ne sert qu’à empêcher la mise en œuvre de véritables politiques favorables aux peuples dans chaque pays membre et à l’échelle de l’Union. Il est temps d’engager la lutte politique, idéologique et électorale pour se sortir de ce piège.
A bas l'Union européenne des 28 !
Vive l’union de tous les peuples et nations d’Europe !
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