Législatives : garder la tête froide et hors de l'eau

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panneaux électoraux 2024

 

Depuis la décision de Macron de dissoudre l’Assemblée nationale, à l’issue de sa défaite aux ʺélectionsʺ européennes, les esprits s’échauffent, les humeurs se répandent et s’exaspèrent entre les « trois blocs » qui briguent la première place et les médias assoiffés de joutes verbales, de ʺpunch-linesʺ et de faux débats. Évidemment, les noms d’oiseaux volent en escadrille et l’arme de la peur est devenue une règle du jeu partagée.
« Par hasard » sans doute… voilà que l’Union européenne vient de signifier officiellement à la France qu’elle ne respecte pas les règles budgétaires (les fameux 3%) inscrites dans les traités et qu’elle est en déficit excessif depuis des années. Pan sur le bec ! La France est l’objet de menaces de sanctions financières qui se comptent en point de PIB, à moins qu’elle ne mette en place un plan d’austérité drastique de réduction des dépenses publiques… en partie déjà engagé par Macron pour 2024. L’ombre des nuages noirs annonçant l’orage des « marchés financiers », des agences de notation et des investisseurs plane donc déjà sur le futur gouvernement français qui sortira des urnes. Il est prévenu : il sera mis sous un sévère contrôle de l’UE… Les programmes et les mesures présentés et soumis au vote des citoyens seront ainsi nuls et non avenus. Ce sera le grand prêche de la « réalité économique », que le RN a déjà entamé, et la soumission à l’UE...

Qui pourrait s’en étonner ? Qui ignore encore que l’UE est une secte supranationale de mafieux âpres au gain ? Ben oui, c’est la messe en latin globish qui préside aux destinées des peuples des pays membres de l’Union européenne. Et comme le Traité de Lisbonne a été, en 2008, intégré à la Constitution française par la volonté des parlementaires réunis en Congrès pour fracasser les 55% de non au TCE, les décisions du parlement français ne peuvent plus y contrevenir… Les voilà donc pieds et poings liés. Sauf à désobéir en s’émancipant de la tutelle mais ça, ce n’est pas dans leurs programmes !
Notons à ce propos que les partis (quasi tous) qui considèrent que l’Union européenne est protectrice pour « ses » 500 millions de « citoyens », et qu’il faut surtout y rester, vont devoir faire la danse du ventre. Songeons en particulier au Nouveau Front populaire et bien évidemment à la bande encore macroniste et au RN prêts à obéir le doigt sur la couture du pantalon, qui ne revendiquent pas la sortie de l’UE, ni de l’euro ni de l’OTAN. De ce point de vue, ils se placent tous comme de rigoureux comptables garants de l’équilibre financier du pays défini par les critères des marchés !
Après avoir présenté leurs programmes aux syndicats patronaux en essayant de passer pour les premiers de la classe « option gestion », ils « chiffrent » avec acharnement le « coût » financier des mesures qu’ils préconisent pour démontrer leur sérieux. Décidément ils donnent publiquement à voir qui sont et resteront leurs patrons ! Comme si la politique se devait de passer sous les fourches caudines des comptables et des banquiers !

Macronisme saison 3 ou « danger » ou « chaos » !

Voilà les choix proposés aux citoyens appelés en urgence à voter les 30 juin et 7 juillet : le macronisme saison 3, qui pense sauver sa peau en endossant le maillot de l'arbitre entre le « danger » du RN et le « chaos » du Nouveau Front populaire. Et c’est bien tout l'objectif visé par la dissolution brutale et la tenue d’élections législatives en trois semaines : faire croire qu’après lui le déluge. Macron a tout fait pour que cette situation prévale sur une réflexion à froid sur les moyens à mettre en œuvre pour rompre avec la situation calamiteuse dans laquelle il a plongé la France depuis son accession au pouvoir. Pourtant cette division de façade est factice. Pas de panique, le point commun entre ces trois blocs est bien plus fort que ce qui les divise au fond. On va y venir.

Macron, saison 3

A priori, Macron ne fait plus illusion. La majorité des Français sait que son action a essentiellement consisté à accélérer les politiques néolibérales favorables au grand patronat, au CAC 40 et à parachever le démantèlement du Programme du Conseil national de la Résistance, action déjà engagée par les gouvernements précédents de droite comme de gauche. Le choix du marché absolu mondialisé, servi par un État à la botte, a produit les effets prévisibles sur la vie des Français mis hors-jeu de la ʺmondialisation heureuseʺ. Les Français ont été plaqués au sol et privés de respiration par toutes les mesures antisociales qui leur ont été infligées, y compris ces derniers temps à coup de 49.3. Des milliers d’entre eux, Gilets jaunes des campagnes et des ronds-points, ont été réprimés avec violence, méprisés et vilipendés. Les manifestants contre l’allongement du temps de travail, deux ans de plus au boulot ou au chômage, ont été ignorés par le pouvoir et par tous ceux qui dénoncent « les assistés », feignasses se vautrant dans leur canapé plutôt que de traverser la rue pour accéder à un super contrat à durée déterminé de 8 jours et à temps partiel de préférence.

Confier le pouvoir au RN ne résoudra pas les raisons de la colère

On comprend alors que la dissolution de l’Assemblée nationale offre aux Français en colère une occasion d'envoyer Macron dans les cordes, quitte à voter pour un RN auquel ils n’adhérent pas sur le fond des idées (52% des votants pour le RN aux Européennes sont dans ce cas (1). Mais ils pensent « qu’on n’a jamais essayé le RN » et croient que ce parti n’est pas plus à risque que les autres qui leur ont chanté la prospérité et l’égalité et qui ont gouverné maintes fois sans améliorer d’un iota leurs conditions d’existence.
En réalité, le RN n’offre rien au peuple qui puisse changer réellement ses conditions de vie. Il se contente de passer un vernis sur ses convictions rétrogrades et conservatrices, son obsession xénophobe, sa vision ethnique de la nation qu’il dissimule derrière des promesses de réduction de flux migratoires. Il est prêt à tout pour grimper sur le trône et, sitôt élu, laisser dans le fossé le monde du travail dont il n’a jamais défendu les intérêts. Sa seule valeur « sur le marché électoral » est de ne jamais avoir gouverné. Est-ce suffisant pour se jeter dans les bras d’un parti opportuniste naviguant au fil des crises et qui organise la confusion entre nationalisme et souveraineté nationale ? Un parti qui ne défend rien d’autre qu’un capitalisme national  et une vision étriquée de la société. Et qui, de surcroît, a renoncé à l’indépendance de la France en revendiquant l’appartenance à l’UE, l’euro et l’Otan ?

Et puis il y a la « gauche » du Nouveau Front populaire...

Et puis, il y a "la gauche", celle qui, telle la marée guidée par la lune, va et vient, de renoncements en trahisons, de reddition en lâcheté. Celle qui charrie algues vertes et débris nauséabonds des cargos mondialisés qui défèquent des produits chimiques et du gasoil, polluent les plages sous lesquelles il serait bien plus utile de déterrer les pavés…
La gauche, mythique, la gauche d’avant-hier, pas toujours parfaite mais si désirable dans ses habits rouge, blanc et bleu. La gauche qui chante le Chant des partisans, qui résiste contre le nazisme, l’occupant allemand, pour libérer la France, la rendre souveraine et indépendante. La gauche qui nationalise les grandes entreprises de l’énergie, de la Poste, du rail, les industries stratégiques, qui porte la création d’une Sécurité sociale universelle. La gauche qui fait siennes les aspirations des ouvriers, des exploités, des opprimés, celle qui affirme son opposition au capitalisme, qui ne compose pas avec l’adversaire politique ni avec l’ennemi de la nation. La gauche de la jeunesse et des travailleurs de Mai 68. La gauche internationaliste. La gauche pacifiste qui agit pour la Paix et la solidarité entre les peuples. La gauche qui sait nommer ses adversaires et ses ennemis. Celle qui a su se porter aux avant-postes des combats en faveur des classes dominées. La gauche qui portait la lutte des classes et la démocratie sociale tout comme son attachement à la Nation, à la souveraineté et à la Paix. Bref où est cette gauche ?
Le Nouveau Front populaire, qui se réclame de la gauche, est hélas bien loin de cette gauche de combat : c’est une auberge espagnole où chacun apporte son plat prêt à réchauffer et un vin rouge coupé d’eau tiède. Son programme est une liste de mesures, certes utiles, aux smicards, aux précaires, aux futurs retraités. Le retour à l’ISF fait chaud au cœur, mais dans le cadre de la libre circulation des capitaux il risque d’être un pansement sur une jambe de bois.  Le Nouveau Front populaire est loin, bien loin d’une rupture avec le système supranational capitaliste qui a paupérisé, confisqué les richesses, privatisé, laissé l’hôpital exsangue, affamé les services publics, et asservi peuples et pays à la primauté d’un modèle économique imposé, y compris à l’État, quitte à broyer le sens même du mot démocratie.
En réaffirmant son attachement à l’UE, le Nouveau Front populaire s’aligne sur la doxa européiste et usurpe ainsi les origines auxquelles il prétend se référer. Il a capitulé d’avance. Il n’annonce aucune véritable rupture, il est dans les clous du marché et de la Ve République. C’est un me too sous domination consentante ! S'il parvenait à la tête du prochain gouvernement, il n’aurait qu’une infime marge de manœuvre. L’Union européenne veillera, le Conseil constitutionnel cassera les décisions de l’Assemblée nationale en cas de dérapage. Faute d’avoir la lucidité et le courage d’affronter le réel, c’est-à-dire la main mise de l’Union européenne, le Nouveau Front populaire s'est déjà condamné à la servitude volontaire, comme le fit Tsipras en Grèce, en renonçant à sortir de l’Union européenne et de l’euro. Sans considération des citoyens et, en première ligne, des travailleurs, ceux qui paient toujours la note ! 

Et pendant ce temps-là, les risques réels d’élargissement de la guerre sont dissimulés 

La faim de toute puissance de Macron et de ses donneurs d’ordre n’est jamais assouvie. Et le pire est invisibilisé par les « trois blocs » qui postulent à la députation et au titre de Premier ministre pour diriger un nouveau gouvernement de cohabitation. Ce pire se nomme guerre. Pas celles qui se déroulent à l’autre bout de la planète et sur lesquelles les commentateurs égrainent leurs analyses sur les chaînes d’info en continu, sans risque pour leur vie. Non, la guerre, la vraie, avec ses horreurs, ses blessés, ses mutilés et ses morts, ses destructions, ses prisonniers. Celle qui sacrifie d’abord la vie de la jeunesse. Celle qui menace de s’étendre en Europe et peut-être dans le monde. La guerre de l’OTAN, des États-Unis à qui l’Union européenne a remis les clés de nos pays. La guerre que la grande finance sait stimuler et alimenter quand elle craint que ses intérêts et sa domination soient menacés. Et cette guerre est attisée, nourrie par Macron lui-même, se déclarant prêt à envoyer des militaires français en Ukraine contre la Russie. La guerre qui est financée tant par les États-Unis que par l’Union européenne et de multiples pays membres. Cette menace avance à marche forcée. Au risque d’un cataclysme encore plus violent et plus destructeur qu’il ne l’a jamais été. Cet enjeu est de taille mais il est remisé dans les fonds de carton de la campagne des Législatives. Tous les prétendants à la députation se sont d’ailleurs déclarés favorables au soutien indéfectible à l’Ukraine, à son armement, quoi qu’il en coûte !

Pour répondre à cette question, qui concerne chacun et chacune et dont les conséquences s’imposeront au pays tout entier, il faut peser les enjeux et déjouer les pièges tendus.
On nous menace d’un parlement et d’un pays ingouvernables. Qu’est-ce que cela signifie ? Qu’un des blocs ne disposera pas de la majorité des voix au Parlement. Et alors ? Quels sont les risques concrets ? Que le parlement ne s’accorde sur rien ou au coup par coup. Mais n’est-ce pas la situation depuis 2022 ? La différence étant que le 49.3 sera bien plus difficile à mettre en œuvre. Tant mieux !
On nous fait peur avec le risque d'une crise de régime ? Et alors ? La crise, la vraie, ce sont les citoyens qui la subissent depuis des années. 
Les institutions de la République seront en panne ? Et alors ? N’est-ce pas la réalité depuis ces dernières années ? Ne sommes-nous pas des millions à le dire, à revendiquer une nouvelle Constitution définie par le peuple pour le peuple ? À proposer la mise en place de référendums d’initiatives citoyennes (RIC) ?
Un gouvernement risque de ne pas pouvoir être nommé faute de parti majoritaire. Bon. Et alors ? C’est dans l’inédit que l’imagination peut reprendre le dessus et inventer autre chose. Et pourquoi pas un RIC ? Un référendum ? Des assemblées de citoyens qui inventent les institutions de demain ? Une nouvelle Constitution ? Un grand mouvement pour la Paix ?
On nous menace du chaos ? Mais c’est déjà le chaos, en France rurale comme en France des banlieues et des territoires d’outre-mer ! 
Mais il est vrai que nous ne sommes à l’abri de rien : Macron pourrait se mettre en tête de s’attribuer les pleins pouvoirs, ce que lui permet la Constitution. Mais pour autant aurait-il le dessus sur le peuple et le Parlement ? (2)
Le risque majeur est celui de la marche forcée vers la guerre. Mais un président de la République, à lui seul, pourrait-il en décider, le laisserions-nous faire ? Ne serait-il pas possible d’enclencher un débat national et populaire permettant de décider guerre ou paix ?
La vraie sortie de crise institutionnelle et démocratique serait possible, oui : par un référendum pour ou contre l’appartenance à l’Union européenne, dans des délais permettant une grande campagne populaire, comme en 2005 sur le Traité constitutionnel européen.

Le Pardem a décidé de ne soutenir aucun des trois blocs constitués. Aucun ne répondant aux enjeux essentiels et ne permettant de rompre avec la logique supranationale qui conditionne toutes les décisions du parlement et s’imposent aux citoyens.
Ni Macron saison 3, ni le RN dont la principale tare est de vouloir supprimer le droit du sol, ni même le Nouveau Front populaire qui rejoue la gauche plurielle, la Nupes, par un simple changement de nom.
Le 30 juin, chacun-chacune fera ce qui lui semble le plus juste, selon qu’il aura choisi les intérêts qu’il veut défendre après avoir déjoué les pièges tendus.
Si, par chance, dans votre circonscription, se présente un candidat qui s’engage pour la Paix, la souveraineté nationale et populaire, le progrès social et la sortie de l’UE, de l’euro, de l’Otan et du néolibéralisme, forme mondialisée du capitalisme, alors n’hésitez pas à voter pour lui ou elle !
Dans l’avenir, il nous appartiendra, ensemble, de mener ces batailles émancipatrices pour que les Français recouvrent leur souveraineté et construisent les nouvelles bases d'institutions républicaines véritablement démocratiques.
Pour la Liberté, l'Égalité, la Fraternité, la Laïcité, l'indépendance de la France, le progrès social, une République démocratique, souveraine et sociale contrôlée par les citoyens !

NOTES :
1.    https://pardem.org/labstention-1er-parti-de-france-23-992-509-voix
2.    https://www.vie-publique.fr/fiches/273931-les-pouvoirs-exceptionnels-definis-par-larticle-16-de-la-constitution