Le Plan de Castex n’en est pas un : c’est un commissariat européen intégré à l’État français !

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Jean Castex

Par le Parti de la démondialisation

Le 18 juillet 2020

D’abord il faut le reconnaître : l’homme est habile et sacrément inspiré par les recettes sociales libérales ! Le discours de politique générale prononcé par le Premier ministre devant l’Assemblée nationale en atteste. Hollande, sors de ce corps ! C’est le grand retour des emplois aidés pour les jeunes, la poursuite des réductions de cotisations sociales, l’augmentation de 100 000 contrats civiques… et le retour vers le futur de la création d’un Commissariat au Plan ! La situation sociale ne serait pas si grave que l’on pourrait en rire.

Avec le déballage de tous les mots magiques jetés dans le cornet, qui deviendront les « éléments de langage » pour les semaines à venir : une nouvelle méthode, un dialogue social renforcé avec les organisations syndicales, la glorification du bon sens des territoires contre la rigidité du national (l’État ?), l’homme à l’accent chantant semble disposer des précieuses qualités d’un DRH envoyé au feu. Objectif : faire passer la pilule des coups durs qui vont assommer des centaines de milliers de salariés dont les emplois vont être rayés d’un clic de souris et rangés dans de gigantesques tableurs. Le Premier ministre nous prépare donc au pire. D’autant que les prévisions ne cessent de s’alourdir : un million d’emplois devraient s’envoler en fumée d’ici le printemps 2021. Crise Covid ? Pas seulement. Certains des plans sociaux qui s’annoncent étaient déjà ficelés bien avant… Mais cela, Monsieur Castex ne le dit pas.

 

Nous n'entrerons pas aujourd’hui dans le dédale des mesures égrainées par l’homme de terrain : énarque, ex-conseiller du temps de Sarkozy, inspirateur de la T2A (tarification à l’acte) lors de son passage comme directeur des hôpitaux, etc.

Nous préférons mettre la lumière sur le « Commissariat au Plan » vu par Monsieur Castex.

En préambule il faut souligner l’essentiel : nul ne peut ignorer que l’État d’aujourd’hui est quasiment privé de tout moyen d’action en matière de planification économique. La France placée sous tutelle de l’Union européenne, dont le traité de Lisbonne est intégré à notre Constitution depuis 2008, inféodée par les directives européennes, liée par de multiples traités de libre-échange, conseillée et contrôlée par les GOPE (recommandations de l’Union européenne prescrivant annuellement à chacun des pays de l’Union les réformes à conduire), ficelée par l’euro, est devenue vassale. L’État est à la botte du néolibéralisme et à la merci du marché. Il n'y a pas d'État stratège en France !

Alors, que sera donc ce « Plan » sauf un instrument de gestion des 100 milliards annoncés pour combattre la « crise ». C’est-à-dire un bidule technocratique et gestionnaire à effet de communication ?

Monsieur Castex, nous avons le plaisir de vous présenter le ministère du Plan conçu par le Parti de la Démondialisation qui, lui, s’est inspiré de celui du CNR et du Général de Gaulle dont vous vous réclamez.

Nous vous en souhaitons une bonne lecture. Bien entendu, nous n’hésiterons pas à vous faire part de nos réactions lorsque votre Commissariat au Plan sera mis en place et mettra en musique l’utilisation des 100 milliards annoncés (dont 60 devraient provenir de l’Union européenne qui ne manquera pas de demander des comptes).

Un ministère du Plan pour planifier !

La conception de l’économie doit changer

Pour le Parti de la démondialisation, les politiques économiques doivent avoir pour but de développer la prospérité générale dans certaines limites collectivement admises, non seulement en préservant l’environnement, mais en réparant ce qui a été saccagé. Pour y parvenir, c’est toute la conception de l’économie qui doit changer, et qui doit même être révolutionnée.

En premier lieu, la propriété des grands moyens de production doit changer de mains afin de préparer efficacement la sortie du capitalisme. « L’éviction des grandes féodalités économiques et financières de la direction de l’économie », pour reprendre l’expression du programme du Conseil national de la Résistance (CNR), viendra compléter la nationalisation du système bancaire et financier et celle des grands médias. Elle permettra de mettre en œuvre un programme de réindustrialisation articulé à une mutation écologique, sociale et démocratique des modes de production et de consommation. Les mesures protectionnistes prises dans le cadre rénové de la Charte de La Havane de 1948 consolideront l’ensemble. La planification démocratique du développement national sera organisée au sein d’un nouveau ministère dédié à cette fonction : le ministère du Plan. Sans propriété sociale des grands moyens de production, la souveraineté populaire et la souveraineté nationale ne seraient que des formules creuses.

La planification économique que nous voulons est basée sur un pouvoir de décision détenu par le parlement et le gouvernement à la suite d’un débat national pour choisir les grandes orientations stratégiques.

Les difficultés concrètes de la mise en place d'une économie planifiée ne doivent cependant pas être ignorées, notamment à partir de l’expérience des pays socialistes. Parmi les difficultés il a été observé que plus une économie nationale se diversifie, plus le nombre des produits qu’on y fabrique s’accroît, plus les procédés techniques mis en œuvre se multiplient, et plus certaines formes de centralisation risquent de devenir inefficaces car le processus de planification peut se trouver submergé par le nombre et la complexité des problèmes à résoudre et par la multitude des connaissances et des informations dont il faut disposer pour les résoudre correctement. Plus la société se développe, plus la planification doit se concentrer sur les grandes priorités stratégiques, sans entrer dans les détails au niveau national si on ne veut pas être noyé dans la complexité de l'activité humaine. C’est pourquoi la planification ne peut porter que sur les grandes orientations structurelles, le marché conservant une place afin de permettre la souplesse nécessaire. Une grande liberté doit être accordée aux collectivités locales, aux services publics, aux entreprises nationales, aux PME et TPE. Et à la parole des citoyens.

La solution efficace et crédible, pour nous, est la décentralisation de la planification, c’est-à-dire les décisions stratégiques relevant du parlement, et les décisions d’application plus détaillées relevant des entreprises nationales, services publics, collectivités territoriales. La planification ainsi conçue affaiblira le capitalisme car elle offre la possibilité d’utiliser pleinement les capacités productives (main-d’œuvre et équipements), permettant de construire un système plus juste et plus rationnel du point de vue économique, social, environnemental, démocratique. En outre les gains pour la population seront considérables puisque le chômage structurel disparaitra, le pouvoir d’achat augmentera grâce à un rapport de force favorable au peuple, le sentiment d’appartenir à un système plus égalitaire dynamisera les énergies.

Création du ministère du Plan et mise en œuvre d’une planification démocratique

Le Commissariat général au Plan ou Commissariat général du Plan (CGP) a fonctionné entre 1946 et 2006. Il était chargé de définir la planification économique du pays, notamment via des plans quinquennaux. Il s'est transformé en Centre d'analyse stratégique (CAS) en 2006, puis en Commissariat général à la stratégie et à la prospective (CGSP) en 2013.

Dominique de Villepin l’avait supprimé en novembre 2005 après qu’il eût été progressivement étouffé depuis la disparition des lois de planification. Le Centre d'analyse stratégique (CAS) qui lui avait succédé, en mars 2006, est apparu rapidement comme un simple outil de veille, un think-tank des pouvoirs publics, ne parvenant à s'impliquer ni dans la préparation ou l'évaluation des stratégies publiques ni dans la réforme de l'État.

Le 8 janvier 2013, dans ses vœux aux corps constitués, François Hollande fit resurgir le fantôme du Commissariat au Plan. Le président de la République annonça la création d’ « un commissariat général à la stratégie et à la prospective ». Pour permettre à l'État, non pas de revenir à la planification du temps de la Libération, mais d'anticiper. Son rôle serait de « prévoir les mutations de la France et du monde, dans cinq ans, dix ans, quinze ans ». Associant les « partenaires sociaux » et « les meilleurs experts de la société », il devait porter « une vision cohérente de l'avenir ». « Nous avons besoin de connaître, non pas ce qu'il va se passer, assurait M. Hollande, mais ce que nous devons faire en tant qu'État, en tant que nation, pour nous mettre en avant. »

On retiendra, par charité pour François Hollande, que l’idée de planification était alors revenue dans le débat politique. Mais entre ce projet vaporeux - qui a visiblement inspiré le nouveau Premier ministre de Macron - et les objectifs d’une vraie planification comme celle mise en place à la Libération, il y a un fossé sérieux.

Nos principes pour la construction d’une économie planifiée

L’économie planifiée que nous voulons ne sera pas bureaucratisée. Ce ne seront pas les seuls dirigeants de l’État qui planifieront l'économie du pays. La population participera elle-même à la planification de l’économie.

Il ne faut donc pas confondre la planification que nous voulons avec celle des ex-pays socialistes. Nous sommes d’accord avec ce que disait de Gaulle : « Le plan n’est pas une coercition. Il est une orientation ». Il ajoutait toujours à propos du Plan : « il embrasse l’ensemble, fixe les objectifs, établit une hiérarchie des urgences et des importances, introduit parmi les responsables et même dans l’esprit public le sens de ce qui est global, ordonné et continu, compense l’inconvénient de la liberté sans en perdre l’avantage ».

Il poursuivait : « Nous voulons donc la mise en commun de tout ce que nous possédons sur cette terre, et pour y réussir il n’y a pas d’autre moyen que ce que l’on appelle l’économie dirigée. » (Discours prononcé à Lille, le 1er octobre 1944.) Cependant, « dirigisme », dans sa bouche, ne veut pas dire suivre une direction prédéterminée selon une logique préétablie, car explique de Gaulle « les grandes affaires humaines ne se règlent point uniquement par la logique, il y faut l’atmosphère que seule peut créer l’adhésion des sentiments ». Ainsi, la conception gaullienne de la planification, d’une économie dirigée, n’est pas celle d’un chemin prédéfini à la soviétique, mais le rassemblement volontaire de tous les efforts nationaux, « l’affection du pays tout entier » pour l’accroissement des ressources communes, c’est-à-dire de la « richesse nationale ».

Dans la France de 1962, l’adversaire le plus estimé du général de Gaulle, Pierre Mendès-France, écrivait alors dans Pour une république moderne : « Chacun reconnaît aujourd’hui que l’État est responsable de l’évolution économique, qu’il lui appartient de lutter contre les crimes et le sous-emploi, de stimuler et de coordonner les efforts en vue de l’expansion et du progrès communs. Personne ne peut plus défendre sincèrement le libéralisme du dernier siècle, personne ne croit plus à la valeur de la vieille formule : ‘‘Laissez faire, laissez passer’’. Elles [les institutions de l’État] doivent constituer un ensemble cohérent dont les différentes parties, au lieu de se contrarier et de se neutraliser, comme ce fut souvent le cas, se renforcent, se complètent et se soutiennent les unes les autres. Cet ensemble, c’est le Plan. »

La planification que nous voulons s’inspire de ces principes, elle se définit par une adhésion, un volontarisme et par une double négation : négation du « laisser faire, laisser passer » libéral, et négation de « l’écrasement des individus ». Le Plan « rassemble », et ménage l’entente et l’harmonie élémentaire entre toutes les catégories sociales, tous les citoyens.

La création du ministère du Plan et les trois phases de la planification

Un ministère du Plan est créé, ses fonctions sont mises en œuvre par une administration qui lui est attachée.

Les fonctions du ministère du Plan

- Organiser et gérer le processus de planification.

- Préparer le projet de loi de planification pour la première année du Plan, et les lois annuelles de mise à jour.

- Identifier le volume et la nature des investissements publics et privés nécessaires à la réalisation du Plan.

- Conseiller le gouvernement sur les stratégies économiques à mener.

- Coordonner l’action des ministères concernés par l’élaboration puis la mise en œuvre du Plan.

- Piloter la politique de substitution aux importations

- Préparer, impulser et coordonner les politiques d’aménagement du territoire.

- Autoriser ou non les investissements étrangers.

- Assurer la coordination de l’activité économique territoriale (zones industrielles, zones de haute technologie, zones économiques frontalières…).

- Gérer l’aide publique au développement (APD).

- Gérer la signature des contrats de Plan avec les entreprises nationales, les services publics et les collectivités territoriales, parfois avec des entreprises privées.

- Coordonner et diriger la participation des représentants de l’État dans les conseils d’administration des entreprises nationales.

- Collecter, produire, analyser et diffuser des informations sur l'économie et la société françaises.

- Publier régulièrement des informations et rapports sur la mise en œuvre du Plan.

L’administration du ministère du Plan

L’administration du ministère du Plan se voit renforcée par la direction générale de l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) dont il exerce la tutelle à la place du ministère des Finances. L'INSEE collecte, produit, analyse et diffuse des informations sur l'économie et la société françaises. Elle est également chargée de coordonner les méthodes, les moyens et les travaux statistiques des administrations publiques et d’organismes privés. L'INSEE devra être profondément réformé pour le soustraire à l’influence des lobbies du capital.

Le Commissariat général à la stratégie et à la prospective (CGSP), qui a remplacé le Commissariat au Plan, passe sous la tutelle du ministère du Plan. Ce n’est plus le Premier ministre qui en exerce la tutelle. Le CGSP dissout, ses agents sont intégrés au ministère du Plan.

L'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), service de l’État placé sous l’autorité du ministre de la Cohésion des territoires, créée en 2020 résulte de la fusion du CGET (Commissariat général à l’égalité des territoires) avec d'autres organismes. Le CGET était déjà né en 2014 de la fusion de la Datar, du Comité interministériel des villes et de l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances. Elle est dissoute et fondue dans le ministère du Plan, ses agents sont intégrés au ministère du Plan. C’est désormais le ministère du Plan qui prépare, impulse et coordonne les politiques d’aménagement du territoire menées par l’État. À ce titre, il assure la préparation des Comités interministériels d’aménagement et de développement des territoires.

La Banque publique d’investissement (BPI) et l’Agence des participations de l’État (APE) sont fusionnés dans le Fonds stratégique d’investissement (FSI), leurs agents y sont intégrés. La tutelle du FSI passe au ministère du Plan, sa gestion reste confiée à la Caisse des Dépôts et Consignations.

Les services administratifs du ministère de la Ville, du ministère de la Jeunesse, des Sports et de la Vie associative sont intégrés à l’administration du ministère du Plan. L’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances (Acsé), opérateur des programmes sociaux en faveur des habitants des quartiers sensibles, créée par la loi pour l’égalité des chances du 31 mars 2006 (n°2006-396), passe sous la tutelle du ministère du Plan.

Le ministère du Plan assure en outre la tutelle :

- du Pôle financier public.

- des entreprises nationales.

- des secrétaires généraux pour les affaires régionales (SGAR).

Tant qu’il existera des conseils régionaux, et non des conseils interdépartementaux comme nous le préconisons, le secrétaire général pour les affaires régionales (SGAR) au sein de chaque préfecture de région, et ses services, passent sous la tutelle du ministère du Plan. Le SGAR est actuellement, dans une préfecture de région, le haut fonctionnaire chargé, sous l'autorité du préfet de région, de coordonner la politique de l'État en matière de développement économique et d'aménagement du territoire ainsi que les relations entre l'État et le conseil régional. Le SGAR est un membre du corps préfectoral, au même titre que le préfet, le secrétaire général de préfecture, le directeur de cabinet du préfet et les sous-préfets d'arrondissements. Le SGAR est notamment chargé de la négociation du contrat de projets État-région, sous l'autorité du préfet de région. Il est également chargé actuellement d'une grande partie de la gestion des fonds européens (FEDER, FSE, FEADER) sur le territoire régional. Bien entendu, une fois la France sortie de l’euro et de l’Union européenne cette fonction disparaîtra. Le SGAR dispose d'un service propre essentiellement composé de cadres, généralement des chargés de mission.

Le ministère du Plan mettra en place dans chaque département une délégation départementale au Plan. Structure légère, son rôle sera d’animer la phase d’élaboration du Plan, la coordination des acteurs départementaux pour sa mise en œuvre, et la liaison avec le ministère du Plan.

Au total, au début, l’administration centrale du ministère du Plan devrait compter environ 500 agents, auxquels s’ajoutent les agents des délégations départementales et des SGAR.

Les trois phases du processus de planification

Le ministère du Plan est chargé de piloter les trois phases du processus de planification :

La phase initiale est celle de la délibération publique. Elle permet à tous les citoyens, directement et au sein des organisations et organismes qui les représentent, de participer à son élaboration. La délibération concerne les citoyens, les services publics et entreprises nationales, les administrations centrales et locales, les collectivités territoriales, et de façon incitative les entreprises privées.

Les citoyens seront rassemblés par les municipalités, en présence de représentants du ministère du Plan et des sous-préfets. Ces nouvelles formes de cahiers de doléances seront centralisées et analysées à l’échelon départemental et rendus publics. Des débats seront organisés, leurs conclusions transmises au ministère du Plan. Le processus débouchera sur des contrats de Plan État-département et État-structures interdépartementales. Les contrats de Plan État-région sont annulés, la région ayant vocation à disparaître. Le corps préfectoral, à l’échelon départemental, en liaison avec la délégation départementale du ministère du Plan, sera la cheville ouvrière de la phase de délibération publique. Il impulsera cette phase avec les élus locaux.

Les entreprises nationales, représentées par leur direction, les salariés et les syndicats, seront sollicitées pour participer à la délibération publique. Elle débouchera sur des contrats de Plan entre l’État et ces entreprises nationales. Même chose pour les services publics, les administrations centrales et locales, les collectivités territoriales et les entreprises privées qui le souhaiteront.

La seconde phase est celle de la décision qui appartient à l’Assemblée nationale. Pour préparer la décision des représentants de la nation, le ministère du Plan sera organisé en deux grandes directions. La première est celle des secteurs économiques. Elle comporte des cellules d’experts chargées de suivre les différents secteurs économiques de l’économie nationale, tout en assurant une veille internationale (sidérurgie, informatique, industrie automobile, banques…). La deuxième direction est celle de la synthèse macroéconomique. Elle réceptionne les propositions des différents acteurs de la phase de concertation, les dépouille et les affecte aux cellules chargées des secteurs économiques. Elle assure le secrétariat de la commission nationale de planification. Cette dernière est composée d’une centaine de membres représentant les divers secteurs économiques (directions et syndicats), qu’il s’agisse du secteur privé ou national, et des collectivités territoriales et services publics. Des chercheurs et universitaires en feront partie. C’est à partir de son activité que le projet de loi de planification sera élaboré.

La troisième phase concerne la mise en œuvre de la planification sous la responsabilité du ministère du Plan. Elle sera décentralisée dès lors que le Plan représente le cadre général dans lequel chacun doit s’inscrire, tout en accordant une large autonomie d’action aux acteurs qui doivent fixer leurs propres objectifs détaillés. Ce système doit se décliner à tous les niveaux : nation, départements, communes, mais aussi dans tous les secteurs économiques et sociaux, et notamment dans les entreprises nationales mais aussi parfois privées, les administrations, les services publics, les collectivités territoriale… Le corps préfectoral, à l’échelon départemental, impulsera la mise en œuvre du Plan en liaison avec les délégations départementales du ministère du Plan.

Prenons un exemple pour bien nous faire comprendre

Lors de l’élaboration du 4e Plan (1962-1965), il est constaté que l’économie française connaît une croissance économique soutenue, la France passe d'une situation de pénurie à une relative abondance, la consommation de masse fait son apparition. Les priorités portent alors sur la « modernisation » des secteurs jugés « retardataires » : secteur hospitalier, autoroutes et télécommunications, éducation nationale. Quelle serait la traduction concrète de ces priorités stratégiques si ces objectifs s’appliquaient à notre époque selon les conceptions du Parti de la démondialisation ? Une fois le projet élaboré par le Plan à la suite d’une immense délibération publique, le parlement, saisi, aurait débattu et adopté le plan quinquennal. Des mesures budgétaires auraient traduit ces priorités.

Concentrons-nous, dans le cadre de cet exemple, sur l’éducation nationale. L’amélioration de la situation, depuis la maternelle jusqu’aux grandes écoles, concernant les aspects matériels, portera sur les locaux, l’équipement des locaux, l’augmentation du nombre d’agents enseignants et non-enseignants. Certains locaux doivent être construits, d’autres rénovés, et tous correctement entretenus. Avant de construire de nouveaux locaux, il faudra parfois se procurer des terrains.

La question se posera alors du choix des entreprises de bâtiment missionnées pour effectuer les travaux. Une ou deux grandes entreprises nationales seraient nécessaires pour assurer l’indépendance du pays, limiter les coûts (pas besoin de rémunérer les actionnaires), d’autant qu’une partie très significative du chiffre d’affaires de ces entreprises vient de commandes publiques. Dans tous les cas, un contrat de Plan sera signé avec chaque entreprise (ou groupe), qu’elle relève du secteur privé ou public et avec les collectivités territoriales concernées. Ces contrats de Plan porteront sur les aspects techniques et financiers des travaux à entreprendre. Mais ils porteront aussi sur les aspects environnementaux et sociaux. Sur les aspects environnementaux, les dispositifs les plus stricts et les plus efficaces seront exigés en matière de choix des matériaux, d’isolation phonique et thermique, de consommation d’énergie… La mutation écologique du mode de production et la transition énergétique devront prendre ici tout leur sens. Les mêmes exigences s’appliqueront en matière sociale concernant le respect du droit du travail. Le non-respect de ces normes environnementales et sociales de haut niveau pourra se traduire par une réquisition de l’entreprise.

Nos objectifs pour le Plan 2021-2026

Notre orientation générale est d’améliorer le plus rapidement possible la vie quotidienne de la population qui a trop souffert des politiques néolibérales de gauche et de droite de ces quatre dernières décennies. Pour y parvenir, la suppression du chômage et de la précarité est impérative, c’est la mesure qui s’impose. Car la suppression du chômage et de la précarité permet de faire d’une pierre deux coups.

D’abord, l’élimination de ce fléau redonnera espoir et joie de vivre à des millions de citoyens. Le droit opposable à l’emploi leur apportera un salaire « normal » les mettant définitivement à l’abri du besoin. Il entraînera une amélioration quantitative de la consommation qui devra s’articuler à son amélioration qualitative. L’agriculture française en bénéficiera, ainsi que le logement et les industries de l’équipement ménager. C’est ici que la politique de substitution aux importations prendra tout son sens, car sinon cette amélioration du niveau de vie se traduira par des importations, déséquilibrant notre économie et créant du chômage.

Ensuite, les personnes au chômage ou en précarité occuperont nécessairement des emplois. Mais lesquels ? Au début, il ne faudra pas trop compter sur le secteur privé qui ne pourra voir ses effectifs augmenter rapidement que grâce à la RTT (32h par semaine en 4 jours). Les effets du multiplicateur keynésien mettront plusieurs mois à faire sentir leurs effets, comme la sortie de l’euro et les nouveaux investissements publics. En revanche, il faudra compter à court terme sur le droit opposable à l’emploi. S’appliquant pour l’essentiel dans le secteur non-marchand, des emplois utiles pourront y être créés pour les chômeurs et précaires dans le cadre d’un statut « normal ».

À très court terme (quelques semaines pour assurer le démarrage, un an ou deux pour la montée en charge), les secteurs qui permettront à la fois d’améliorer les services au public et de résorber le chômage sont :-Augmentation des effectifs dans les transports publics ,- augmentation des effectifs dans l’Éducation nationale, des maternelles aux grandes écoles (enseignants, personnels administratifs, techniques, surveillance, assistantes sociales, médecins scolaires, orientation et information…).

- Augmentation du personnel dans les hôpitaux publics, EPAHD, crèches (personnels soignants et non-soignants).

- Augmentation du personnel dans le parc HLM (gardiens, sécurité, entretien…).

- Augmentation du personnel dans la fonction publique territoriale (voirie, culture, sport, éducation, petite enfance, espaces verts, animation socio-culturelle…).

- Augmentation du personnel dans la fonction publique d’État (justice, police, armée, gendarmerie, travail, impôts…).

- Augmentation des effectifs dans le secteur de la prise en charge du handicap, du travail social...

Pour atteindre ces objectifs, des politiques transversales seront mises en œuvre :

- Mutation écologique du mode de production et transition énergétique.

- Substitution aux importations.

- Agriculture paysanne et non pas l'agro-chimie de la FNSEA.

Et qu’on ne vienne pas nous opposer que la France n’a pas les moyens de financer un tel plan ! Au lieu de subventionner l’économie néolibérale (les multinationales) à coup de centaines de milliards empruntés aux banques, l’argent public doit être mis au service des besoins populaires.

Rappelons pour conclure qu’un Commissariat au Plan ou un Ministère du Plan n’a de sens que si le cadre constitutionnel permet à l’État d’agir dans tous les domaines de manière souveraine. Son existence n’a donc de sens et de raison que hors du champ de la tutelle de l’Union européenne. Sinon c’est une entourloupe et de la communication !